7 juillet 2016 - 00:00
Flushgate maskoutain
Par: Martin Bourassa

« Erreur humaine » titrait à la Une le Journal de Montréal mardi matin pour expliquer la mort de milliers de poissons dans la rivière Yamaska ces derniers jours. Permettez que nous corrigions le tir une fois de plus.

L’erreur en cause n’est pas tant humaine que municipale. C’est toute l’organisation municipale qui est en cause et qu’il faut pointer du doigt. C’est en effet toute la Ville de Saint-Hyacinthe qui porte aujourd’hui l’odieux de ce désastre prévisible.

Et le mot désastre n’est certes pas trop fort. Le désastre environnemental ne fait aucun doute. Les spécialistes qui ont été dépêchés sur le bord et dans la rivière depuis vendredi confirment la mort de milliers d’alevins et de poissons, même si relativement peu de spécimens flottent à la surface de l’eau ou se décomposent sur les rives.

Les dommages sont dans le lit de la rivière, une rivière déjà polluée à l’extrême et mal aimée. Une rivière qui n’avait pas besoin de ça, pas besoin qu’on en rajoute. Pouvait-on faire autrement? Pouvait-on éviter d’ouvrir les vannes et d’acheminer à la rivière 8,5 millions de litres d’eaux usées? Je ne sais même pas si on s’est posé la question.

On l’a pourtant fait à Montréal au moment du fameux Flushgate qui a déversé en octobre dernier 4,9 milliards de litres d’eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent.

Mais vu la quantité, Montréal n’a pas pu faire autrement.

En comparaison, notre flushgate maskoutain ne serait qu’une goutte d’eau dans le fleuve. Le hic, c’est que 8,5 M de litres d’eaux usées dans une rivière Yamaska qui coule à sec à la fin juin, c’est une tout autre affaire. De toute évidence, personne ne s’est soucié de l’impact qu’un tel déversement pourrait avoir, même si l’opération était pourtant planifiée depuis plusieurs semaines.

Il faut savoir que ce n’est pas la première fois que la Ville procédait à une surverse dans la rivière. C’est une solution courante, si l’on se fie aux statistiques, et pratique. Et habituellement sans grand dommage, du moins jamais de cette ampleur.

Les responsables étaient tellement convaincus du caractère anodin de cette pratique qu’une fois mis devant le fait accompli, soit le désastre naturel, on a mis trois ou quatre jours avant d’allumer et de se demander s’il n’y aurait pas un lien de cause à effet entre le déversement d’eaux usées et la mort de milliers de poissons. On le répète, le coupable ne se trouve pas à l’usine d’épuration. La responsabilité de ce fiasco retombe sur les épaules et la tête de toute l’organisation municipale, à commencer par la direction générale habituellement si contrôlante. Il est assez difficile de croire qu’une opération du genre ait pu se faire sans que ce soit discuté au préalable à l’interne avec les personnes en autorité, surtout si elle était planifiée!

Le maire Claude Corbeil a pris le blâme et fait son mea culpa. Il a promis que toute la lumière serait faite sur cette histoire qui vient ternir d’un seul coup des années d’efforts dans la réhabilitation de la rivière Yamaska et des initiatives pourtant fort louables de son administration en matière environnementale. C’est un autre aspect du désastre, celui de l’image publique de Saint-Hyacinthe. Cette image est entachée.

Il faudra aussi passer en revue tout l’aspect des communications et de la gestion de crise à l’interne, deux aspects avec lesquels la Ville de Saint-Hyacinthe en arrache.

Il faudra revoir la chaîne des événements pour savoir si les bons gestes ont été posés aux bons moments dès que l’alerte a été donnée, à savoir que quelque chose clochait dans la rivière à la hauteur de Saint-Hyacinthe. De toute évidence, non.

Et force est d’admettre que tout ne tourne pas rond à l’Hôtel de Ville non plus.

Il faudra bien plus que des excuses du maire pour réparer les dégâts. Au prochain plan triennal d’immobilisations, il faudra aussi prévoir quelques ensemencements massifs sur quelques années dans la rivière Yamaska.

Voilà qui sera beaucoup plus bénéfique que n’importe quelle amende.

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