La CPTAQ a constaté en avril 2018 pour la première fois que l’entreprise Corporation d’énergie thermique agricole du Canada (CETAC), aussi connue sous les noms Agrodômes ou Blockchain Data Center, exploitait une mine de cryptomonnaie permettant d’alimenter des serres sur une terre agricole. La Commission a rendu une ordonnance afin de faire cesser ce qu’elle considérait comme une activité commerciale non autorisée en zone agricole.
Après avoir reçu l’ordonnance, Benoît Laliberté a déposé une demande officielle afin d’autoriser ce type d’activité commerciale sur ce lot, non sans avoir aussi contesté l’ordonnance, mais en vain. La CPTAQ a refusé la demande en 2023. La décision a été confirmée par le Tribunal administratif du Québec en avril 2024. Durant le processus, souligne la CPTAQ, Benoît Laliberté a envoyé des courriels menaçants et agressifs et entrepris une multitude de procédures judiciaires afin d’éviter d’appliquer la décision de la CPTAQ. « CETAC a sciemment contrevenu à la Loi au mépris de l’ordonnance pendant des années, mais a aussi systématiquement attaqué et poursuivi en justice quiconque a tenté d’empêcher son projet de se réaliser », peut-on lire dans la requête déposée à la Cour supérieure par la Commission.
La requête de la CPTAQ vise à forcer la Coopérative régionale d’électricité Saint-Jean-Baptiste-de-Rouville à couper l’alimentation en électricité à CETAC. La Coopérative ne peut refuser de fournir l’électricité à un client tant qu’il paie et respecte les conditions au contrat.
CETAC génère des revenus grâce à des modules informatiques qui alimentent l’algorithme de cryptomonnaie. En 2019, CETAC avait déclaré 5500 modules. Plus une personne fournit une grande quantité de puissance de calcul contribuant à l’algorithme, plus la récompense sous forme de monnaie virtuelle est grande.
En 2019, les revenus étaient de l’ordre de 388 414 $. Selon les estimations de la CPTAQ, l’entreprise pourrait générer des revenus, aujourd’hui, neuf fois supérieurs à ceux déclarés en 2019. Ces revenus permettent donc de financer les nombreuses procédures judiciaires visant à s’opposer à l’ordonnance, dénonce la CPTAQ.
Toutes ces allégations n’ont pas encore été prouvées en cour.
Licences annulées
Le 3 mai dernier, le Bureau des régisseurs a annulé les licences d’entrepreneur de construction de deux des entreprises de Benoît Laliberté, soit Société de Développement United et Les Industries United Canada, en plus de refuser de délivrer une licence à l’entreprise Bâtiment United Canada. Une quatrième entreprise, Construction United Canada, a abandonné sa licence de construction.
Selon la Régie du bâtiment, la situation financière catastrophique de Laliberté l’empêche de posséder des actifs au Québec ou de voir son nom être inscrit sur différents registres. « Benoît est une personne incapable d’établir [qu’il possède] de bonnes mœurs et [qui] peut exercer avec compétence et probité les activités d’entrepreneur », peut-on lire dans la décision.
La Régie a pu démontrer que Benoît Laliberté a créé deux fiducies pour poursuivre ses activités commerciales au Québec. Ces fiducies sont devenues actionnaires majoritaires d’entreprises de construction détentrices de licences. « Le lien particulier qui relie ces fiducies à Laliberté lui permet d’exercer sur celles-ci et sur les entreprises qu’elles détiennent une influence morale. Cette influence dépasse celle d’un conjoint qui conseille sa conjointe sur ses entreprises. Laliberté, par ses actions, participe activement aux activités des intimées et il exerce sur eux un contrôle direct ou, à la limite, indirect. »
Les représentants des entreprises concernées se sont tournés vers le Tribunal administratif du travail pour tenter de suspendre provisoirement la décision du bureau des régisseurs. La demande a été rejetée le 14 mai par la juge administrative Annie Laprade et le dossier reviendra devant un tribunal pour une audience sur le fond.
Benoît Laliberté a aussi une longue liste de reproches et d’infractions à son dossier. Il avait notamment été déclaré coupable en 2008 de 41 chefs d’accusation en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières. Il avait commis également des infractions aux lois fédérales du revenu et des taxes et été contraint en 2010 de payer 206 000 $.
Avec la collaboration de Denis Bélanger.