13 avril 2023 - 07:00
Hedwig et le pouce en furie
La grande liberté de Benoit McGinnis
Par: Maxime Prévost Durand
« Je n’ai aucune pudeur quand je suis Hedwig sur scène. Je plonge dans le rôle et je tripe au boute », s’exclame le comédien Benoit McGinnis en parlant du rôle principal qu’il campe dans la pièce Hedwig et le pouce en furie. Photo Alexandre Cotton�

« Je n’ai aucune pudeur quand je suis Hedwig sur scène. Je plonge dans le rôle et je tripe au boute », s’exclame le comédien Benoit McGinnis en parlant du rôle principal qu’il campe dans la pièce Hedwig et le pouce en furie. Photo Alexandre Cotton

Habillé en femme, avec des talons hauts, une robe et une perruque, Benoit McGinnis se présente sur scène comme jamais auparavant dans le théâtre musical Hedwig et le pouce en furie. En se glissant dans la peau d’Hedwig, comme il le fera au Centre des arts Juliette-Lassonde le jeudi 20 avril, le comédien joue, chante et... s’émancipe.

« Hedwig me donne accès à une liberté incroyable, lance Benoit McGinnis en entrevue téléphonique avec LE COURRIER. Je n’ai aucune pudeur quand je suis Hedwig sur scène. Je plonge dans le rôle. Je me fais croire que je suis Hedwig et je tripe au boute! »

La pièce prend des allures de spectacle rock. C’est sur scène qu’on retrouve Hedwig, un jeune Allemand homosexuel qui, dans une quête de liberté et d’amour, s’est fait couper les parties génitales et s’est mis à porter une perruque dans l’espoir d’une vie meilleure aux États-Unis. Son changement de sexe a tourné au cauchemar, d’où le « pouce en furie » en référence à son opération bâclée, mais Hedwig décide tout de même de continuer à porter la perruque. Le personnage, qui n’est ni femme ni drag queen, livre ensuite à travers le rock’n’roll les tumultes amoureux qu’il a traversés.

« Pour moi, c’est un plaisir incroyable parce que ça rallie tout ce que j’aime, soit de chanter – il y a même un groupe de musiciens sur scène – et de jouer. Plus le show avance, plus on tombe vers quelque chose de théâtral et ça devient plus émotif et sensible. »

Le spectacle ne s’adresse pas aux jeunes oreilles, mais il ne tombe pas dans la vulgarité pour autant malgré quelques blagues plus salaces.

« Hedwig est très irrévérencieuse. Elle a du punch et de la drive au début, mais elle devient plus près d’elle et plus vraie au fil du spectacle », raconte son interprète.

Bien que l’histoire de la pièce soit teintée par les notions de genre, elle ne résonne pas qu’auprès de la communauté LGBTQ+, assure Benoit McGinnis.

« C’est un show non genré, dans le non-jugement et dans l’ouverture. C’est comme un show rock, mais il y a une histoire. Les gens basculent avec Hedwig dans cette émotivité. Dans le show, Hedwig raconte comment elle va faire pour rencontrer son autre moitié dans la vie, comment elle va faire pour trouver quelqu’un qui va l’aimer pour qui elle est vraiment. Ça touche pas mal tout le monde au final, qu’on soit non genré, binaire ou hétérosexuel : est-ce que je vais trouver quelqu’un qui va m’aimer et m’accepter comme je suis? »

Après avoir vu la version originale de la pièce à Broadway, Benoit McGinnis caressait le rêve d’incarner le rôle d’Hedwig. C’est d’ailleurs lui qui a initié, quelques années plus tard, l’idée d’en faire une adaptation québécoise. Il a approché le metteur en scène René-Richard Cyr, un collaborateur de longue date, qui a sauté à pieds joints dans l’aventure.

Le comédien avait déjà participé au processus de création de certaines pièces dans lesquelles il a joué par le passé, notamment en assistant aux réunions de production, mais jamais il n’avait porté un projet de cette façon.

« C’est quelque chose que je veux faire de plus en plus. Je ne veux pas juste être un interprète qui arrive dans un show et à qui on met un costume sur le dos. J’aime faire partie des réunions, entendre les idées et qu’on se nourrisse de ça tous ensemble. Ce show-là me tient particulièrement à cœur. Il est spécial parce que ce n’est pas Caligula de Camus, Hamlet de Shakespeare ou Les Trois Sœurs de Tchekhov, c’est un show que personne ne connaît, donc merci d’oser venir nous voir! »

Hedwig permet aussi au public d’apprécier le talent de chanteur de Benoit McGinnis, une facette de lui que l’on a pu découvrir davantage récemment avec sa participation à l’émission Zénith et avec ses présences à En direct de l’univers.

« C’est un rêve de p’tit gars pour moi parce que je voulais être chanteur quand j’étais petit. Toutes les occasions que j’ai de chanter, c’est juste du bonheur. Je n’ai aucune angoisse quand je chante », affirme-t-il avec le sourire dans la voix.

« Si je faisais de la musique et que je composais des tounes, probablement que j’aurais des chansons à mon actif et que j’aurais envie de les sortir, poursuit-il. J’aurais peut-être une carrière musicale comme Evelyne Brochu ou Émile Proulx-Cloutier, qui sont des acteurs-chanteurs. Mais je ne crée pas mon matériel. Pour l’instant, je sens plus le besoin de l’intégrer dans mon travail d’interprète et d’acteur. C’est pour ça que Hedwig comble tout ce que j’aime. Je me cherchais des projets dans lesquels j’allais pouvoir chanter sur scène. En tant que moi, je n’étais pas sûr [de vouloir le faire], mais en Hedwig, c’était parfait pour ça. »

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