En vertu de la Politique de protection des rives, du littoral et des plaines inondables (PPRLPI), ce sont les municipalités, par le biais de leur inspecteur municipal, qui détiennent le mandat de veiller à ce que les bandes riveraines soient respectées.
En mars, les municipalités qui composent le territoire maskoutain ont mandaté la MRC, par le biais d’une entente intermunicipale pour la fourniture de services, à appliquer le règlement des bandes riveraines sur leur territoire. « Nous allons fournir les ressources humaines et les ressources matérielles aux municipalités », illustre Micheline Martel, adjointe à la direction générale et directrice du transport à la MRC des Maskoutains.
Pour y parvenir, la MRC mise sur son nouveau service régional d’accompagnement et d’inspection. Celui-ci comptera deux employés : un inspecteur des rives ainsi qu’un conseiller à l’aménagement des rives. Le premier a été embauché en février et sera chargé de l’application du règlement concernant les bandes riveraines, tandis que le second, dont le rôle a été confié à l’employé de la MRC Félix-Antoine d’Autray Tarte, aura pour mission de guider et de sensibiliser les propriétaires riverains en zone agricole.
Il est trop tôt pour savoir combien de municipalités adhéreront à l’entente de service puisqu’elles doivent d’abord faire entériner une résolution par leur conseil municipal en ce sens.
Or, plus tôt cette année, 15 municipalités sur 17 avaient accepté de déléguer leur compétence en matière de bande riveraine à la MRC des Maskoutains. Ce règlement a ensuite été abrogé pour faire place au modèle actuel basé sur une entente de service.
« Les municipalités avaient déjà donné leur accord pour une délégation de compétence, alors je ne vois pas pourquoi ça changerait maintenant », soutient Francine Morin, préfet de la MRC des Maskoutains et mairesse de Saint-Bernard-de-Michaudville.
Les municipalités de Sainte-Madeleine et de Saint-Pie avaient refusé de voir leur compétence en matière de bandes riveraines passer sous juridiction régionale. La position de Sainte-Madeleine ne risque pas de changer puisqu’elle dénombre à peine 0,4 kilomètre de bandes riveraines en zone agricole. Du côté de Saint-Pie, le maire Mario St-Pierre s’est dit « ouvert [à adhérer], mais qu’il restait encore des choses à vérifier ».
Le service régional d’accompagnement et d’inspection engendrera des frais de 128 500 $ pour sa première année d’utilisation. Cette somme sera payée par les municipalités concernées sous forme de quotes-parts versées à la MRC et calculées, entre autres, en fonction du nombre de kilomètres de bandes riveraines présentes sur le territoire agricole de chaque municipalité.
Inspecteur indépendant
Il y a fort à parier que ce changement de garde permettra d’augmenter la présence des bandes riveraines en milieu agricole. Même si la PPRLPI existe depuis 1987, elle demeure encore à ce jour très peu respectée.
« Parfois, ça peut être gênant ou embêtant pour l’inspecteur municipal de faire appliquer la réglementation lorsque le propriétaire fautif est un membre de la famille ou une connaissance. Puisque l’inspecteur de la MRC sera indépendant, ça va faciliter le tout », souligne André Charron, directeur général de la MRC des Maskoutains.
Pour sa part, la préfet Morin a comparé l’entrée en poste d’un inspecteur indépendant à une forme de soulagement pour les municipalités. « Les élus veulent que le règlement soit respecté et bien appliqué. C’est pourquoi cette entente de service est vraiment la meilleure chose qui puisse arriver. Certaines de nos municipalités collaborent déjà avec un inspecteur indépendant, alors on s’est inspiré d’elles. »
Bien qu’il se dise « optimiste », André Charron estime qu’à peine 50 % des bandes riveraines sont conformes en zone agricole sur le territoire maskoutain. La MRC ne dispose toutefois pas d’un portrait précis à l’heure actuelle. La caractérisation des 3500 kilomètres de bandes riveraines figurera d’ailleurs parmi les mandats prioritaires de l’inspecteur des rives.
Pour ce qui est du nombre de constats d’infraction remis aux producteurs contrevenants au cours des dernières années, le directeur général croit « qu’il ne doit pas y en avoir eu beaucoup ».
LE COURRIER avait recensé, en septembre 2019, seulement trois municipalités qui veillaient au respect des normes de conformités en matière de bandes riveraines : Saint-Hyacinthe (quelques infractions signalées en cinq ans), Saint-Jude (19 contraventions en 2018) et Saint-Barnabé-Sud (5 constats d’infraction en 2017).
André Charron affirme néanmoins que son équipe « ne sera pas là pour remettre des constats d’infraction le jour 1 ». « Nous ne sommes pas les méchants. Notre objectif est plutôt de sensibiliser et d’accompagner les agriculteurs dans ce processus-là. En contrepartie, ça fait longtemps que l’UPA fait des campagnes de sensibilisation sur les bandes riveraines. Donc, ça ne devrait être une surprise pour aucun agriculteur lorsque nous irons l’informer de la réglementation en vigueur », a-t-il précisé.
La réglementation prévoit qu’une bande de végétation doit être maintenue à au moins trois mètres de ligne des hautes eaux et à au moins un mètre du haut du talus en bordure des cours d’eau. Pour les fossés, la bande riveraine doit être d’un mètre, minimalement.
Un modèle assez unique
Rares sont les MRC qui ont reçu le mandat de veiller à la protection des bandes riveraines de la part de leurs municipalités, a pu constater LE COURRIER. Le modèle retenu sur le territoire maskoutain, lequel est basé sur une entente de fourniture de services, est quasi unique en Montérégie.
Des quatre MRC avoisinant celle des Maskoutains, seule l’organisation régionale de La Haute-Yamaska a adopté un modèle similaire. Depuis 2017, la MRC assure le contrôle de la conformité des bandes riveraines par le biais d’une entente intermunicipale de fourniture de services. De 2012 à 2016, elle appliquait plutôt les normes de protection riveraine en vertu d’un règlement de contrôle intérimaire, explique Marlène Pawliw, coordonnatrice aux communications de la MRC de La Haute-Yamaska.
Du côté des MRC de La Vallée-du-Richelieu, de Rouville et d’Acton, les municipalités locales détiennent la responsabilité de l’application de la réglementation sur les bandes de protection riveraines.
Toutefois, à la demande des élus, la MRC d’Acton pilote un projet de caractérisation des bandes riveraines sur son territoire depuis 2017. En partenariat avec la Corporation de la rivière Noire, ce sont plus de 650 kilomètres de bandes riveraines qui ont été caractérisées sur un objectif de 1000 kilomètres.
« Pour les portions de cours d’eau ayant fait l’objet de travaux d’entretien de cours d’eau entre 1995 et 2018, plus de 60 % des bandes riveraines agricoles n’avaient pas le 1 mètre minimum sur le replat de talus. […] Les propriétaires de ces terres agricoles recevront tous, ce printemps, un avis de courtoisie les invitant à se conformer d’ici la prochaine visite », détaille le directeur général adjoint et directeur du service de l’aménagement de la MRC d’Acton, Serge Dupont.