Même s’ils montent au front, leur mobilisation n’est pas garante de succès. Il n’est pas assuré qu’ils seront entendus puisque le Ministère est resté silencieux face à leurs doléances depuis l’été 2024.
C’est le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard, qui a été le premier à se manifester en juillet. Dans une lettre envoyée à l’ancien ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, il sollicitait une rencontre avec l’élu afin de lui faire part de ses préoccupations sur les délais encourus pour obtenir une réponse. Il désirait aussi rappeler les éléments qui pouvaient permettre au projet de franchir rapidement l’étape de la désignation.
« De même, le prolongement du processus de désignation représente une perte d’opportunités pour une éventuelle annonce puisque certains investissements, publics et privés, d’abord associés à notre projet original, n’ont pu être retenus plus longtemps et ont dû faire l’objet d’annonces au cours des derniers mois. Bien qu’ils soient de bonnes nouvelles pour notre écosystème d’innovation et qu’ils témoignent de son dynamisme et de sa capacité à générer des investissements, la réalisation de ceux-ci préalablement à la désignation de la zone vient diluer l’impact et l’ampleur du projet global sur lequel nos équipes et nos partenaires ont travaillé ardemment au cours des dernières années », avait écrit le maire.
Il n’a jamais obtenu de réponse à cette lettre et le ministre Fitzgibbon a démissionné le mois suivant. Les acteurs de la zone d’innovation n’ont toutefois pas lâché le morceau et ont fait parvenir des lettres à la nouvelle ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Christine Fréchette, en octobre.
La première lui est parvenue du Conseil de transformation alimentaire du Québec. « Ce projet a le potentiel de catalyser l’émergence de projets collaboratifs et d’attirer des investissements, avec un total de 1,7 G$ en investissements sur cinq ans, dont 461 M$ pour les infrastructures et équipements, 320 M$ pour des projets de recherche et développement et environ 931 M$ pour soutenir la création et l’expansion d’entreprises », est-il mentionné.
Contactée par LE COURRIER à la suite de l’annonce du refus du Ministère, la présidente-directrice générale du CTAQ et membre du Conseil des partenaires en innovation de la Cité de l’innovation agroalimentaire, Sylvie Cloutier, a souligné que ces chiffres étaient ceux qui avaient été avancés par Saint-Hyacinthe Technopole à l’automne. Mme Cloutier, qui signait la lettre avec la présidente de son conseil d’administration, Élisabeth Bélanger, n’a pas non plus obtenu de réponse.
Après avoir appris la nouvelle du refus, le 24 février, elle est restée subjuguée. « Je trouve aberrant que le gouvernement ne tienne pas compte du secteur de la transformation agroalimentaire plus que ça. Nous avons investi beaucoup de temps et d’énergie dans ce projet. J’étais convaincue que le processus se déroulait bien et qu’il restait juste à savoir quand la désignation serait obtenue. Je pensais que le délai s’expliquait par une question de budget et de priorités », a-t-elle mentionné.
Elle soutient que les arguments du Ministère pour justifier son refus sont infondés. Il a notamment soutenu que le caractère de la filière ne lui permettait pas de se positionner à l’international et que les innovations prévues ne changeraient pas nécessairement les règles du jeu dans l’industrie. Mme Cloutier est convaincue que le refus de Québec aura pour conséquence que certains des investissements ne se feront pas, que des projets n’aboutiront pas et que cela aura un impact à plus long terme sur tout le secteur en matière d’innovation. Elle trouve cela déplorable alors qu’avec l’application des tarifs douaniers des États-Unis, il y a plus que jamais besoin d’innovation dans le domaine.
Le lendemain de l’envoi de la lettre de Mme Cloutier au Ministère en octobre, le maire de Saint-Hyacinthe, le préfet de la MRC des Maskoutains, Simon Giard, le président de Saint-Hyacinthe Technopole, Patrick Malo, et le président du Conseil des partenaires en innovation de la Cité de l’innovation agroalimentaire, Sylvain Fournaise, ont aussi relancé la ministre pour solliciter une rencontre. Ils ont été suivis cinq jours plus tard des membres du Conseil des partenaires en innovation. Ce dernier réitérait son appui au projet. La ministre n’a jamais répondu.