19 juillet 2012 - 00:00
Le pouvoir sans coulisse
Par: Le Courrier

Depuis quelque temps, on entend de plus en plus parler de faire de la politique autrement. Bien que ce ne soit pas expliqué précisément, j’adhère à cette idée de revoir en profondeur la façon de faire de la politique au Québec. Par contre, il m’est d’avis que cela ne sera possible que si on décide de couvrir la politique autrement.

D’entrée de jeu, je tiens à dire que je ne blâme rien ni personne. Ce texte est une réflexion de ce qu’est devenu le jeu politique et sa couverture médiatique. Dans mon esprit, il n’y a ni coupable ni innocent, que des victimes.Je ne surprendrai personne lorsque j’affirme que l’image a le dessus sur le propos. De nos jours, le message n’est médiatisé que s’il est bien ou très mal présenté, d’où l’avènement des fameux faiseurs d’image. C’est un métier en pleine expansion. Mais ces nouveaux gourous du marketing politique ne pourraient exister sans les médiums qui justifient leur existence. Et c’est ici que les médias entrent dans l’arène. Les journalistes ragent souvent contre la langue de bois des députés et ministres, mais dès qu’un de ces derniers sort des sentiers battus, on parle alors de gaffe médiatique.Ce n’est pas d’hier que les acteurs politiques et les gens qui couvrent le domaine politique vivent dans une promiscuité intense. Lorsque la démocratie moderne est née, le journalisme politique est apparu, créant des relations humaines entre politiciens et journalistes au quotidien. Mais depuis peu, les supports médiatiques ont explosé. Journaux, radio, télévision, ça va encore, mais lorsqu’on rajoute chaînes d’informations continues et internet (sites de nouvelles, blogues, forums) et médias sociaux (Facebook, Twitter….) cette intensité devient malsaine puisque plus compétitive. L’un dépend alors de l’autre et vice-versa.Quand une source anonyme à l’intérieur d’un parti quelconque donne un scoop à un journaliste, elle ne le fait pas pour l’amour de l’information publique! Sinon cette source ne s’opposerait pas à ce que son nom soit mentionné! Aucun journaliste politique sérieux n’est assez naïf pour croire ça. Elle veut passer un message, que ce soit planter un couteau dans le dos d’un collègue ou déstabiliser un adversaire. Et cette même source s’attend à un retour d’ascenseur de la part du journaliste dépendamment du niveau d’attention publique de la nouvelle, retour qui reviendra presque assurément à la mesure de cette attention. Un peu comme l’entrepreneur en construction qui donne à un parti et qui s’attend à quelque chose en retour! Un message est donc diffusé par pure redevance malhonnête.Mais à la différence de l’entrepreneur en construction, cela n’est pas vu comme une fraude ou comme un délit volontaire. Ces gestes ne sont pas faits de mauvaise foi d’aucune part. C’est un jeu qui existe depuis si longtemps, que personne ne se rend compte qu’il est pernicieux et qu’il lèse les citoyens. Seulement, si ça arrivait de temps en temps il y a vingt ans, ça se passe presque chaque jour aujourd’hui. La compétitivité des médias multipliée par la volonté des politiciens et de leurs faiseurs d’images de passer leur spin est égale à un cynisme qui frôle la stratosphère parmi la population.Même que bien des fois les deux partis se mentent en coulisse et, ce qui est encore pire, en sont conscients, ce qui amène la plupart des analystes à décrypter les actions des politiciens et à leur prêter des intentions cachées, à tort ou à raison. Et re-vice et re-versa. Et si on s’assoyait et on prenait un peu de recul face à tout ça?On parle de cynisme ambiant et on en cherche la cause. Je parle de deux professions qui ne battent pas des records de confiance dans la population, on se doit de chercher des solutions. Si je crois qu’il faut faire de la politique autrement, je suis convaincu qu’il faut alors la couvrir autrement. L’un ne peut changer sans que l’autre ne le fasse. J’estime qu’une réflexion s’impose. Car ces deux professions font partie des fondations d’une vie démocratique puissante et saine.

Alexis DuceppeSaint-Liboire

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