16 juillet 2020 - 14:38
L’enjeu de la biosécurité
Par: Martin Bourassa
Pour tenter de convaincre la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) que l’option du parc industriel Théo-Phénix ne tenait pas la route et devait être écartée lors du premier examen, Exceldor avait plaidé sa cause en s’appuyant sur des arguments de biosécurité.

La CPTAQ avait tendu l’oreille, mais semblait être demeurée sur sa faim. Elle le sera sans doute encore à la lecture de la nouvelle demande émanant de la MRC.

L’aspect biosécurité ne tient même pas sur 20 lignes du document de 33 pages, bien qu’un rapport d’expertise de 11 pages ait été produit en annexe. Il est signé par le Dr Jean-Pierre Vaillancourt, professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal à Saint-Hyacinthe. « Localiser le nouvel abattoir à proximité des meuneries et de Jefo Nutrition serait une erreur colossale mettant à risque non seulement ces entreprises, mais également une large partie du cheptel avicole au Québec. En cas de confirmation d’une maladie à déclaration obligatoire à cet abattoir, c’est une forte proportion de la production avicole du Québec qui serait immédiatement impactée, causant des problèmes logistiques sévères qui affecteraient, au final, le bien-être de millions d’oiseaux », assure l’expert pour qui l’option au sud, soit l’agrandissement du parc Olivier-Chalifoux où on ne retrouve pas d’entreprises avicoles à proximité, est donc beaucoup plus judicieuse.

Deux entreprises agroalimentaires opérant au parc Théo-Phénix ont aussi pris la peine de s’opposer formellement à l’implantation de l’usine Exceldor dans leur voisinage.

C’est le cas de Jefo, spécialisée dans la production de solutions nutritionnelles non médicamenteuses pour les animaux d’élevage. « Nous sommes inquiets des risques de contaminations par bactéries ou virus que cela pourrait engendrer, que ce soit en amont ou en aval de notre chaîne de fabrication, de transport et d’entreposage », souligne Jean-François Fontaine, vice-président du Groupe Jefo.

Ce dernier ajoute qu’il souhaite « simplement que l’endroit qui leur [Exceldor] sera attribué soit sans conséquence pour l’industrie agroalimentaire locale et internationale ».

LA CPTAQ stupéfaite

L’expert en biosécurité mandaté par la MRC pour démonter la nécessité d’installer l’abattoir d’Exceldor à bonne distance des meuneries et des installations industrielles ou agricoles a fini par servir des arguments qui se sont retournés contre elle.

« La CPTAQ constate que les enjeux de biosécurité exposés par les lettres d’opinion laissent présager l’ajout de nouvelles contraintes sur les possibilités d’utilisation agricole des lots avoisinant le site visé. […] La Commission est stupéfaite de lire dans le rapport de l’expert que la seule conséquence négative du projet est la perte de 23,65 hectares de sols cultivés de classe 2. L’exclusion recherchée vient retirer à jamais du domaine agricole près de 24 hectares d’un des meilleurs sols au Québec pour la culture de végétaux. »

Exceldor à Saint-Anselme

L’expert en matière de biosécurité retenu par la MRC s’est également permis une opinion concernant la situation présente à Saint-Anselme où Exceldor opère une meunerie et un abattoir en voisinage direct. « Il n’y a pratiquement aucune étude portant sur le scénario présent à Saint-Anselme, car on ne retrouve pratiquement jamais cette situation ailleurs dans le monde. […] Cette situation n’était sûrement pas trop problématique au départ alors que la production avicole était beaucoup moins élevée et dense (en particulier entre 1945 et 1973). Nous sommes en 2020. Aucun professionnel du domaine ne devrait recommander le statu quo », conclut le Dr Vaillancourt.

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