17 mars 2022 - 07:03
Aéroport de Saint-Hyacinthe
L’envol municipal
Par: Martin Bourassa
Martin Bourrassa

Martin Bourrassa


Comme la MRC des Maskoutains avant elle, la Ville de Saint-Hyacinthe a refusé d’acheter et de municipaliser l’aéroport de Saint- Hyacinthe. Cet investissement, elle le jugeait trop onéreux et trop risqué pour elle. Pas assez vendeur pour convaincre la population de son utilité et de sa rentabilité. Avec raison.

Sauf que pour un paquet de bonnes ou de mauvaises raisons, elle a toujours cru à son potentiel et à sa valeur ajoutée dans l’écosystème maskoutain. Ce qui explique pourquoi elle se disait prête à appuyer financièrement l’organisme à but non lucratif (OBNL) qui a fait l’acquisition du vétuste aéroport pour un montant de 835 000 $ l’automne dernier.

À tout prendre, la Ville préférait être partenaire, non propriétaire. Restait juste à s’entendre sur le niveau de partenariat et les modalités financières. C’est maintenant chose faite puisqu’une entente est venue sceller la relation de très grande proximité qui prévaut entre l’organisme Aéroport de Saint-Hyacinthe et la Ville.

Et cette entente, contrairement à bien d’autres, n’a pas été gardée secrète. Nous l’avons reçue quelques heures seulement après l’avoir demandée. À sa lecture, on comprend qu’il s’agit pratiquement d’une municipalisation déguisée dans laquelle l’OBNL prend toutes les apparences d’une corporation apparentée. Et on réalise que les hommes d’affaires qui ont formé l’OBNL pour acheter l’aéroport ne l’auraient jamais fait s’ils n’avaient pas eu l’assurance que la Ville volerait à leur secours en partant et chaque fois que le besoin s’en ferait sentir.

D’entrée de jeu, la Ville devient le principal partenaire financier de l’Aéroport, sans toutefois assumer la gestion des opérations et des dépenses courantes. Mais elle pourra déléguer un élu ou un fonctionnaire aux réunions et elle recevra une copie des prévisions budgétaires annuelles et des états financiers annuels. Elle aura à l’œil son investissement. Et c’est tant mieux, car il est significatif. La Ville s’est engagée pour 20 ans à verser une subvention annuelle de fonctionnement de 106 000 $ et à la réévaluer périodiquement et de bonne foi aussi souvent que nécessaire. Voilà un engagement considérable pour une installation qui ne servira jamais autrement que pour l’aviation légère ou de plaisance, vu l’impossibilité de rallonger la piste, coincée entre le chemin de fer et la route 116.

Cela dit, la contribution municipale est cependant moins élevée, pour l’instant du moins, que les quelque 168 000 $ que versent les propriétaires de l’aéroport et des hangars environnants en taxes municipales annuellement.

La Ville s’est aussi engagée à supporter les dépenses non couvertes par une subvention lors des travaux de mise aux normes des infrastructures aéroportuaires qui doivent être refaites rapidement de fond en comble. C’est la zone d’ombre de l’entente, car on ne sait pas trop encore combien la Ville devra débourser pour combler le manque à gagner.

Mais manque à gagner il y aura. Par son statut d’OBNL et contrairement à l’ancien propriétaire privé, Aéroport de Saint- Hyacinthe est admissible à recevoir des subventions pour refaire ses installations, dont la piste qu’il faudra élargir pour la rendre conforme. L’ampleur du chantier de réfection varierait entre 2,5 M$ et 5 M$, selon les estimations préliminaires des plus optimistes et des plus pessimistes. Les subventions attendues épongeront au mieux entre 50 et 75 % de la facture totale. Le reste sera assumé par la Ville.

Les promoteurs de l’Aéroport appartiennent à la catégorie des gens optimistes, eux qui ne manquent certes pas d’ambition pour relancer les activités de l’aéroport qui tirait auparavant ses principaux revenus de la vente de fuel. Des alliances sont envisagées pour accroître le va-et-vient sur la piste, donc les revenus autonomes potentiels. Il y a peut-être un peu de promesses en l’air dans tout ça. On verra à l’usage, comme ce qu’il adviendra du restaurant de l’aéroport acquis par la Ville l’automne dernier pour 160 000 $. Ne soyez pas surpris si elle décidait de le démolir à ses frais et de céder le terrain à son partenaire.

Souhaitons tout de même la meilleure des chances aux gens d’affaires. Mais force est d’admettre qu’ils n’ont pas grand-chose à perdre, à part leur temps, puisque c’est la Ville de Saint-Hyacinthe qui avance le cash.

Au moins, celle-ci a protégé ses arrières et s’est assurée d’un droit de premier refus en cas de revente et qu’elle hériterait des actifs de l’aéroport advenant le crash de l’OBNL. C’est bien la moindre des choses des les circonstances.

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