16 février 2023 - 07:03
Fondation Honoré-Mercier et Place Blanchet
L’épine au pied
Par: Le Courrier
Martin Bourrassa

Martin Bourrassa

Le bras immobilier de la Fondation Honoré-Mercier libéré d’une épine au pied. C’est ainsi que j’ai titré, à la une de notre édition du 9 février, l’achat par le promoteur maskoutain Groupe Marcil de la Place Blanchet pour un montant de 6,5 M$.

Je crois toujours que le choix des mots était tout à fait approprié dans les circonstances que l’on connaît. Au sens figuré, sachez que tirer une épine du pied signifie délivrer d’un grand embarras, d’une situation pénible, d’un empêchement.

Une source de grand embarras, c’est ce qu’aura été depuis septembre 2016 l’achat de la Place Blanchet par Multi- Services Santé Richelieu-Yamaska, le bras immobilier de la Fondation Honoré- Mercier. Il y a sept ans de cela, l’idée que la fondation du centre hospitalier maskoutain se lance dans l’immobilier pour répondre au besoin manifeste de créer une super clinique de services médicaux, tout en consolidant ses finances, pouvait se défendre. D’autres fondations d’hôpitaux s’étaient aventurées sur cette voie et il y avait des modèles desquels s’inspirer. Il y avait pourtant des dissidences au sein même du conseil d’administration de la Fondation, des voix qui doutaient des retombées positives à espérer de cette aventure hors du champ de compétences d’une œuvre de bienfaisance sensée répondre aux besoins du centre hospitalier.

Ce n’était pas dans son « core business », comme on dit dans le milieu des affaires.

Des gens rompus au milieu des affaires et de l’immobilier maskoutain auraient exprimé des réserves et préféré quitter le conseil d’administration de la Fondation.

Pour certains, l’idée qu’elle investisse l’argent précieux des donateurs dans cette aventure risquée était incompatible avec sa mission première.

La majorité des administrateurs a décidé d’aller de l’avant pour le meilleur et pour le pire. Et malheureusement, le pire est arrivé. On raconte que la Fondation aurait payé beaucoup trop cher l’acquisition de la Place Blanchet. N’empêche, le montage financier tenait la route au prix payé, disaient les plus optimistes. C’est le projet de super clinique qui a dérapé solide! Il n’a jamais vu le jour après que des médecins ont renié leur engagement de s’y installer. Ayant flairé la bonne affaire, un autre promoteur a ensuite pris de vitesse la Fondation en bâtissant une clinique spécialisée sur le boulevard Casavant. Les carottes de la Fondation étaient cuites. Son bras financier s’est retrouvé Gros-Jean comme devant avec des bâtisses sur les bras.

Pour se sortir de ce faux pas, la Fondation en a plutôt commis un deuxième en souhaitant s’associer ou vendre ses biens immobiliers à un promoteur privé. Mais elle a misé sur le mauvais cheval en choisissant Habitations Trigone, un promoteur à la réputation plutôt chambranlante, selon la Régie du bâtiment. Ce projet disproportionné de 115 M$ a semé l’émoi dans le quartier et on a aussitôt accusé la Fondation Honoré-Mercier de générer du stress, de l’angoisse et du malheur dans le voisinage alors que certains locataires et propriétaires de longue date sont montés aux barricades pendant que d’autres pliaient bagage.

Pour un paquet de bonnes raisons, Multi-Services Santé Richelieu-Yamaska a tourné le dos à Trigone le printemps dernier, pour finalement accepter une offre d’achat d’un promoteur local il y a quelques jours à peine. Cela semble être une fin heureuse, bien que l’on ne connaisse pas encore les intentions du Groupe Marcil.

Ce dernier est cependant bien au fait des particularités et de la sensibilité des Maskoutains. On peut donc espérer autre chose qu’un pôle santé composé de trois immeubles de 8 à 16 étages.

Concrètement, il est bien difficile de savoir quel impact aura eu toute cette saga sur les finances de la Fondation Honoré-Mercier puisqu’elle ne loge pas tellement à l’enseigne de la transparence et de l’imputabilité ces dernières années. Nous n’avons d’ailleurs pas accès à ses états financiers. Elle réalise toutefois un profit de 700 000 $ quand on compare les deux transactions qui regroupent quelques propriétés, même si la valeur de la Place Blanchet ne s’est nullement appréciée, selon les actes notariés.

Il est à souhaiter que ce soit surtout l’image de la Fondation Honoré-Mercier qui a souffert au fil des années et non son portefeuille. Ce serait assez embarrassant.

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