23 février 2023 - 07:00
Violence dans les écoles
Les syndicats témoignent de l’ampleur du phénomène
Par: Adaée Beaulieu
Cynthia Côté, présidente du syndicat représentant le personnel de soutien du CSSSH. Photo gracieuseté

Cynthia Côté, présidente du syndicat représentant le personnel de soutien du CSSSH. Photo gracieuseté

Alors que la députée libérale Marwah Rizqy a obtenu les données pour les incidents violents dans les écoles et que J.E a réalisé récemment un reportage à ce sujet, LE COURRIER a vérifié si la situation est aussi alarmante au sein des écoles du Centre de services scolaire de Saint-Hyacinthe (CSSSH).

Bien qu’il n’y ait pas de « fight two minutes », un phénomène de bagarres dans les écoles à l’échelle provinciale, les classes mises sens dessus dessous et le personnel malmené sont la réalité dans les écoles du CSSSH aussi, selon les deux syndicats. Depuis septembre, ce sont 240 formulaires d’incidents violents qui ont été remplis par le personnel de soutien et 117 par les enseignants, selon des données syndicales.

« Nous sommes dans une année normale post-pandémie et, là, les cas explosent et ils sont de plus en plus graves. Les professeurs ne sont plus capables d’endurer », déclare le président du Syndicat de l’enseignement Val-Maska, Patrick Théroux. Lui et sa collègue, Cynthia Côté, la présidente du syndicat représentant le personnel de soutien du CSSSH, notent que même les jeunes de 4 et 5 ans mordent beaucoup. De plus, chacun a actuellement un membre en arrêt de travail à cause d’un assaut d’un élève. Au secondaire, on leur rapporte aussi des propos à caractère sexuel. De plus, selon M. Théroux, le phénomène rejoint maintenant la formation professionnelle et l’enseignement aux adultes où les élèves n’ont que faire de l’autorité des enseignants.

Selon Mme Côté, 63 % des incidents violents touchent les techniciennes en éducation spécialisée (TES), 25 % les éducatrices en service de garde et 12 % les préposées aux élèves handicapés qui aident aussi dans les classes de 4 et 5 ans. D’ailleurs, elle constate une hausse au sein des services de garde, car les élèves y arrivent fatigués en fin de journée. Les éducatrices en service de garde commencent donc à demander l’appui de TES. M. Théroux ajoute aussi que la violence est présente dans au moins la moitié des écoles du CSSSH.

Des chiffres pas si collés à la réalité

Les chiffres de cette première moitié d’année sont plus élevés que ceux des années précédentes si l’on regarde les données fournies par le CSSSH. Pour l’année scolaire 2021-2022, 158 événements ont été rapportés, soit 92 liés à de la violence et 66 à de l’intimidation. Pour 2018-2019 et 2020-2021, les chiffres totaux étaient similaires, soit 188 et 172. Seule l’année scolaire 2019-2020 a fait exception avec 75 cas, possiblement en raison de la pandémie.

Toutefois, les syndicats sont unanimes quant à l’interprétation des données. Selon eux, ce n’est que la pointe de l’iceberg, car ce ne sont pas tous les événements qui sont déclarés. D’ailleurs, Mme Côté insiste fort auprès de ses membres pour qu’ils remplissent les formulaires de déclaration d’incidents violents. Selon elle, ce n’est peut-être pas le cas du côté du Centre de services scolaire des Patriotes où ils ne sont pas comptabilisés de la même façon puisque seulement 47 cas de violence ont été dénombrés en 2018-2019 et 81 en 2021-2022.

Cynthia Côté et Patrick Théroux renchérissent en mentionnant que certaines directions découragent le personnel de remplir les formulaires et banalisent parfois les paroles et gestes surtout lorsqu’il s’agit de jeunes de 4 et 5 ans. Certains employés cèdent à leur demande pour maintenir une bonne relation. Toutefois, les deux présidents de syndicats mentionnent que les directions sont souvent prises à devoir rendre des comptes concernant la violence sans avoir les ressources pour la contrer. Il faut donc à leur avis une concertation de l’ensemble des intervenants du milieu scolaire pour enrayer ce phénomène.

Les deux présidents de syndicats mentionnent également que les accidents de travail, qui peuvent être le résultat de gestes violents causant des lésions, ne sont pas inclus dans les données, car il s’agit d’un autre type de formulaire à remplir.

Quelles solutions?

Esther Charette, la régisseuse aux communications du CSSSH, soutient pour sa part que les cas de violence ont diminué dans les dernières années en raison de la pandémie et de l’implantation du système de Soutien aux comportements positifs (voir autre texte ici) dans plusieurs de ses établissements.

Cynthia Côté et Patrick Théroux saluent cette dernière solution, mais soutiennent qu’il en faut une série pour enrayer la violence. Selon Mme Côté, il faudrait encore davantage de personnel spécialisé. « Il nous faut des bras », clame-t-elle. Pour sa part, M. Théroux demande plus de classes spécialisées et qu’elles soient plus accessibles, car les écoles en périphérie de Saint-Hyacinthe n’en ont pas toutes. « Admettre un élève dans une classe spécialisée, c’est aussi ardu que d’obtenir le formulaire A-38 dans le film Les douze travaux d’Astérix », illustre-t-il.

image