Sans se leurrer, ce nouveau plan directeur de l’eau (PDE) avertit que la rivière est encore bien loin d’être en santé. Il faut mentionner qu’il a été présenté le 26 mai et réalisé bien avant le déversement d’eaux usées survenu le 28 juin.
Le document fait notamment état d’une baisse de plus de 30 % du taux de phosphore dans l’eau entre 2002 et 2011, alors qu’un plan d’intervention pour limiter la prolifération des algues bleues visait justement la réduction de ce fertilisant dans les plans d’eau, a souligné le directeur général de l’OBV Yamaska, Alex Roy.
« C’est encourageant parce qu’on voit qu’il est possible d’améliorer la situation lorsqu’on met des efforts sur une problématique », a-t-il commenté, tempérant toutefois en rappelant que le niveau de phosphore dépasse encore de deux fois la norme. L’état global de la rivière reste d’ailleurs « toujours critique », juge-t-il.
Douteuse, au mieux
La qualité de l’eau aux alentours de Saint-Hyacinthe n’a en effet rien de très réjouissant. Les données provenant des six stations d’échantillonnage du ministère de l’Environnement situées dans la MRC des Maskoutains indiquent toutes une qualité de l’eau « mauvaise » ou « très mauvaise », à l’exception de celle installée près du chemin de la Rivière entre Saint-Damase et Saint-Pie (point 3 sur la carte), qui indique une qualité « douteuse ».
Les pires résultats ont été recensés à la rivière de la Barbue, près de l’embouchure avec la Yamaska à Saint-Damase (4), à Saint-Hugues au niveau du pont de la route Yamaska (1) et tout près sur la rivière Chibouet, à la hauteur du 2e rang (2). L’échantillonnage à la rivière Noire à Saint-Pie (5) et au ruisseau Runnels à Saint-Valérien (6) a révélé une qualité « mauvaise », d’après l’indice de qualité bactériologique et physicochimique. Des stations locales ont également recensé une qualité « mauvaise » sur la Yamaska en amont de Saint-Hyacinthe, et « très mauvaise » en aval, à Saint-Simon.
À ce stade, la plupart des usages risquent d’être compromis, incluant bien sûr la baignade et les activités nautiques, mais aussi l’approvisionnement en eau pour la consommation et la protection de la vie aquatique. Rappelons que toutes ces données ont été compilées avant l’épisode de mortalité de poissons.
On retrouve aussi dans le bassin versant les « concentrations de substances toxiques les plus importantes enregistrées dans le sud du Québec », indique le PDE, même si l’exemple de Granby a prouvé que des réductions importantes pouvaient être obtenues grâce à un suivi auprès des entreprises « susceptibles d’être impliquées par le rejet de contaminants dans l’environnement ».
La présence de pesticides reste aussi un enjeu majeur puisque « les analyses révèlent des concentrations élevées dépassant très souvent les critères pour la protection de la vie aquatique », poursuit le document, qui présente un portrait global du bassin versant, puis un diagnostic sur six enjeux différents et propose enfin 117 actions pour améliorer le sort de la Yamaska.
En mode solution
Parmi les principales actions proposées, on y retrouve de manière prémonitoire un meilleur contrôle des surverses aux stations d’épuration, mais aussi la protection des milieux humides, qui comptent pour seulement 4 % du territoire du bassin versant, une meilleure gestion de l’écoulement de l’eau et du transport de sédiments en milieu agricole et l’amélioration de la concertation à travers les rencontres du Regroupement des acteurs municipaux de l’eau (RAME-Yamaska), créé à la suite des États généraux sur l’eau tenus en 2013.
Autant d’actions qui ne sont cependant que suggérées, et non imposées, rappelle Alex Roy. « Le PDE est un outil de planification, il vise à orienter les efforts à déployer pour les cinq prochaines années », explique le directeur général de l’OBV. Même si son organisme aide à la mise en oeuvre des actions et fait le suivi de celles entreprises, il laisse une grande autonomie aux autres acteurs. « C’est là toute la beauté, mais aussi le défi, d’un PDE. Autant le citoyen que l’industrie, le producteur agricole ou la municipalité sont interpellés », explique-t-il. Le document servira aussi « à motiver les troupes sur le terrain », a affirmé le président de l’OBV Yamaska, Stéphane Mailloux, en parlant notamment des comités locaux de citoyens.
Un autre défi important à l’agenda est l’adaptation aux changements climatiques, ajoute Alex Roy. En entrevue plusieurs semaines avant l’histoire des poissons morts, il prévenait déjà que la rivière serait appelée à « connaître de manière plus fréquente des épisodes de faibles débits pouvant aller jusqu’à la sécheresse ». Pour s’y adapter, il faudra notamment trouver des moyens pour améliorer la rétention de l’eau en période sèche, au lieu de l’évacuer le plus rapidement possible », donne-t-il en exemple.
Toujours la plus polluée?
La Yamaska conserve malheureusement le qualificatif « d’affluent important du fleuve Saint-Laurent ayant la plus mauvaise qualité de l’eau », confirme ce nouveau PDE. Cet état de fait ne doit néanmoins pas occulter « les efforts importants réalisés » et les « gains appréciables depuis plusieurs années », avertit le document. Reste à voir à quel point ces gains auront été minés par les tristes événements de l’été 2016, dont l’impact environnemental se fera sentir à long terme, mais qui restera probablement encore plus longtemps dans les consciences.