Un chroniqueur météo est poursuivi devant la Cour des petites créances pour avoir fait des prévisions inexactes. La nouvelle fait le tour du monde, est reprise en boucle et commentée à qui mieux mieux dans la presse et les médias.
Mais quand deux hommes se suicident pendant leur détention au palais de justice peu avant leur comparution, la nouvelle n’interpelle personne, ou presque. On détourne le regard, on hausse les épaules et on se dit qu’après tout ce n’est sans doute pas une grande perte pour la société. Les circonstances de ces décès ne sont pas banales. Surtout quand on s’attarde au second et qu’on constate que les recommandations du coroner chargé d’éclaircir les circonstances du premier décès ont été sciemment ignorées. Pour éviter qu’un détenu désespéré ne commette l’irréparable, le coroner Jean-Louis Roy recommandait au ministère de la Sécurité publique de retirer aux détenus leurs lacets et leurs ceintures. Une ecommandation somme toute logique et raisonnable dans les circonstances, sauf aux yeux des fonctionnaires du Ministère. Pas question de donner suite à une telle recommandation puisque cette mesure pourrait s’avérer « humiliante et non justifiée ».
Pour préserver l’égo d’un détenu, on préfère donc lui laisser la possibilité d’en finir. Au pire, on aura un détenu mort sur les bras, mais un détenu mort à la fierté intacte. C’est sans doute ce qu’on appelle mourir dans la dignité.
Dans le cas récent qui nous intéresse, on ne saura jamais avec certitude si cette mesure aurait pu éviter le pire, mais cela n’aurait certainement pas nui.
Autre point sensible : la surveillance des détenus au palais de justice de Saint-Hyacinthe. Depuis cinq ans, on rapporte deux suicides de détenus à travers tous les palais de justice du Québec. Et ces deux décès sont survenus chez nous. Pas de quoi en être fier.
Plusieurs zones grises méritent d’être éclaircies. Écartons la simple malchance.
Se pourrait-il que la surveillance des cellules ne soit pas efficace et optimale? Est-ce une question d’effectifs insuffisants, de technologie déficiente ou de configuration de locaux mal adaptés? À la lumière de ce que l’on sait, il y avait des caméras de surveillance et des agents correctionnels dans le quartier cellulaire. On ignore combien et ce qu’ils faisaient au moment du drame, mais la victime aurait commis son geste dans un angle à l’abri de la caméra. Un angle mort sans aucun doute. On a bien hâte de lire les prochaines et inutiles recommandations du coroner.Nous croyons que ces deux décès devraient servir à réviser les protocoles en place et à accélérer les pises de décision au sujet de la rénovation du palais de justice dont la vétusté et la mauvaise réputation ne sont plus à faire. Au lieu de détourner le regard et de se bander les yeux, à l’image de la déesse Thémis, il est temps de regarder la vérité en face et d’agir pour assurer le bien-être et la sécurité du personnel, des visiteurs et des détenus qui fréquentent le palais de justice. Un peu d’humanité et d’efficacité ne fera pas mourir personne.