9 mai 2024 - 03:00
Maîtres chez nous! Vraiment?
Par: Le Courrier
Dans la chasse aux énergies renouvelables qui sont essentielles pour faire face aux changements climatiques, des promoteurs privés se lancent à l’assaut des profits qu’on peut tirer de la rente éolienne. Des dizaines de compagnies privées font, en catimini et sans concertation, des offres alléchantes aux agriculteurs pour les meilleurs sites éoliens situés à proximité des lignes de transmission d’Hydro Québec.

C’est à savoir qui aurait la plus belle part du gâteau. Mais pourquoi laisser à des acteurs privés les profits générés par le vent qui pourraient être versés à la société d’État et servir au financement des municipalités et à l’ensemble de la société québécoise?

Un avenir énergétique, ça devrait se développer de façon concertée et intelligente, pas dans ce joyeux bordel où chaque compagnie essaie de damer le pion à son compétiteur! À Saint-Hugues, mon collègue me dit qu’une compagnie lui a offert près de 40 000 $ afin d’obtenir l’autorisation d’implanter une éolienne sur sa ferme. C’est intéressant pour le portefeuille, mais est-ce dans l’intérêt de la société en général? À la période de questions de l’assemblée de la MRC des Maskoutains du 10 avril, le maire de Saint-Pie a admis publiquement avoir été personnellement approché et incité à signer un contrat semblable. L’ironie, c’est qu’au moment de la rencontre, le représentant de la compagnie ignorait que cet agriculteur était également le maire de la Municipalité. Peut-on trouver un meilleur exemple d’un développement désordonné où les promoteurs privés se foutent éperdument aussi bien des autorités locales que de la population?

Cette frénésie éolienne soulève certaines questions fondamentales. La première, c’est la protection de nos terres agricoles. Au Québec, nous avons seulement 2 % de bonnes terres agricoles. Depuis 1978, la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ) tente d’éviter l’étalement urbain sur notre garde-manger. Si l’on parsemait nos champs d’éoliennes, de lignes de transmission et de routes d’accès, nos terres agricoles deviendraient trouées comme du fromage gruyère. Pour préserver notre capacité à nous nourrir tout au long du 21e siècle, pourquoi ne pas placer ces éoliennes sur les 98 % restants de notre territoire impropres à l’agriculture intensive?

Lorsqu’Hydro-Québec a lancé son appel d’offres en mars 2023, il semble que la notion des meilleurs endroits pour capter le vent n’a pas été le critère de base. Notre société d’État a plutôt opté pour des projets situés « à des endroits stratégiques de son réseau dans le sud du Québec, où les infrastructures de transport sont en mesure d’absorber la puissance supplémentaire ». Par contre, près de la Baie-James, il y a « un territoire qui recèle quelques-unes des zones les plus venteuses de tout le Québec ». Voilà quelques années, la communauté crie a songé à développer ce potentiel éolien, car selon elle, cette filière perturberait leur environnement beaucoup moins qu’un nouveau barrage sur des rivières comme la Rupert. Et le tout serait à proximité des lignes de transmission d’Hydro-Québec.

Dans le même ordre d’idées, la suggestion de Louis-Gilles Francoeur de bâtir les parcs éoliens autour des réservoirs hydrauliques d’Hydro-Québec (tels Baskatong, Manicouagan, La Grande, etc.) tombe sous le sens. Dans Le Devoir du 26 février 2024, il écrivait : « Lorsque notre première société d’État a construit ses grands réservoirs, elle a créé non pas une, mais deux sources d’énergie. Si le Québec exploite fort bien la puissance de la force hydraulique, notre première société d’État a jusqu’ici complètement ignoré le fait que les grandes surfaces d’eau de ses réservoirs sont d’exceptionnels puits d’énergie éolienne. »

Cette solution serait une optimisation des ressources hydrauliques et éoliennes. N’oublions pas qu’Hydro-Québec est déjà propriétaire de ces réservoirs dans des régions peu habitées, que les lignes de transmission sont déjà en place pour transporter l’électricité vers les grands centres et que de telles éoliennes n’empiéteraient pas sur nos maigres ressources en bonnes terres agricoles!

L’attribution de ces contrats de production d’électricité ne se fait pas au profit des Québécois ni des municipalités locales, mais à celui d’intérêts privés ou étrangers. […] Quand on est « né pour un p’tit pain »…

Gérard Montpetit, La Présentation

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