Sa fille de 14 ans, Doranne, a besoin d’une assistance pour répondre à tous ses besoins de base, comme se nourrir, s’habiller, changer sa couche et même se déplacer avec un fauteuil roulant.
« Avoir un enfant polyhandicapé est exigeant et extrêmement contraignant. […] Trouver des ressources adaptées à proximité est presque utopique et les moments de répit seul, mais surtout en couple, s’avèrent quasi inexistants si on ne s’y prend pas plusieurs mois à l’avance. Même avec une bonne planification, rien n’est assuré. C’est tellement dommage que dans une belle et grande ville comme la nôtre, les familles dans ma situation se retrouvent presque sans ressource », témoigne-t-elle dans une lettre ouverte reproduite en page 11 de la présente édition.
Doranne a été inscrite au Programme d’accompagnement et d’intégration en camp de jour de Saint-Hyacinthe pendant plusieurs années. Les quatre dernières années, ce programme se tenait au Centre culturel Humania Assurance. Pour la saison estivale 2025, la Ville de Saint- Hyacinthe a choisi d’intégrer à nouveau les enfants ayant des besoins particuliers dans les camps de jour de quartier.
Questionné sur les raisons pour lesquelles la Ville a pris cette décision, le Service des communications nous a mentionné qu’un cadre de référence avait été rédigé et mis en vigueur cette année pour encadrer ce programme. La Ville a ainsi enlevé le volet accompagnement du programme pour se concentrer sur le volet intégration. Le cadre de référence définit les critères d’admissibilité et encadre l’analyse des demandes en fonction de la capacité de l’enfant à participer aux activités régulières, avec ou sans mesures d’accommodement.
« La Ville a choisi de nommer ce service programme d’intégration, car ce terme reflète plus fidèlement notre mandat. Le programme d’intégration vise à offrir un service adapté qui permet aux enfants ayant des besoins particuliers de vivre une expérience de camp de jour enrichissante, sécuritaire et adaptée à leurs capacités. Il ne s’agit pas de fournir une aide ponctuelle, mais bien de favoriser la participation de l’enfant aux activités régulières, et parfois des mesures d’accommodement sont nécessaires », explique la porte-parole de la Ville de Saint-Hyacinthe, Jennifer Drouin-Ostiguy.
Une parmi plusieurs
Heureusement pour elle, Mélanie St-Pierre est enseignante et pourra donc s’occuper de son enfant durant toute la période estivale, mais elle ne pourra compter que sur quelques jours de répit offerts par un autre organisme.
« Il y a vraiment un déficit de services à Saint-Hyacinthe. Au final, je vais me débrouiller, mais combien de familles n’auront pas accès à ce service? Et elles ont su la nouvelle à un mois et demi de la saison estivale », déplore-t-elle en entrevue au COURRIER.
La réponse à cette question est sept. La Ville de Saint-Hyacinthe a refusé l’inscription pour sept enfants handicapés en fonction de deux critères : les enfants devaient démontrer un intérêt et la capacité à participer activement à la majorité des activités régulières et devaient être en mesure de respecter les règles du code de vie. Pour la saison estivale 2025, la Ville a accepté 151 enfants dans le cadre du programme d’intégration au camp de jour.
La Ville a renvoyé Mme St-Pierre aux services de l’organisme Mouvement Action Loisirs inc. (MALI), mais ce dernier offre des services à des enfants handicapés autonomes, excluant d’emblée Doranne. Pour obtenir un service d’accompagnement pour des enfants fortement handicapés, il faut sortir de la région, mais les listes d’attentes sont déjà bien remplies.
« À Saint-Hyacinthe, comment ça se fait qu’il n’y ait rien? Nous avons une école [René-Saint-Pierre] qui accueille des élèves ayant de très grands besoins et provenant de toute la région. Une école fort probablement vacante durant les vacances estivales, qui possède toutes les adaptations possibles et tous les équipements nécessaires à cette clientèle spécialisée ainsi qu’un parc adapté. Il me semble y voir une possibilité », propose-t-elle.
La directrice adjointe de l’Association des parents des enfants handicapés Richelieu-Val-Maska, Emmanuelle Provost, a d’ailleurs été mise au courant de la fermeture du camp de jour au Centre culturel Humania.
« Cette fermeture met en lumière les défis persistants d’accessibilité et de soutien pour plusieurs enfants à besoins particuliers durant la période estivale. Dans la MRC des Maskoutains, le comité Camps de jour inclusion Maska s’est mis en place afin de réfléchir à des solutions concrètes et durables pour l’inclusion de tous les enfants dans les camps de jour. Ce travail de réflexion s’inscrit dans un contexte plus large puisque les défis d’inclusion en camp de jour touchent la majorité des régions du Québec », souligne-t-elle.