1 juin 2023 - 07:00
Pourquoi les citoyens souhaitent un pont Paré 2.0
Par: Le Courrier
Je suis agricultrice à Saint- Valérien-de-Milton et j’ai été stupéfaite à la lecture du texte paru le 17 mai dans Le Devoir. Nous, agriculteurs, sommes accusés de vouloir la démolition du pont Paré et nos machineries d’être l’unique raison de cette volonté. Je suis encore plus surprise de voir que ce journaliste n’a pas pris la peine de contacter des gens de notre municipalité. On ne voit qu’un côté de la médaille dans l’article du Devoir et c’est pourquoi je tiens aujourd’hui à énumérer les multiples raisons qui ont fait en sorte que la Municipalité et la MRC ont plaidé en faveur de sa démolition, avec l’appui des agriculteurs.

Tout d’abord, la structure est dans un si mauvais état que ce n’est pas une conservation d’un patrimoine, mais une restitution semblable qu’on obtiendrait. Le tablier, les approches et les culées doivent être complètement refaits et c’est sans compter que les cornières, les garde-corps treillissés et les poteaux d’extrémité ont disparu, alors qu’ils donnaient tout le cachet au pont (Rapport d’inspection générale, MTQ, 2022). Bien peu d’éléments majeurs d’origine peuvent être conservés, nous ramenant à des coûts de reconstruction presque aussi élevés qu’un pont neuf qui serait accessible aux semi-remorques, aux tracteurs et, surtout, à nos pompiers et premiers répondants.

Lors d’une rencontre avec le ministère des Transports en 2020, l’évaluation des coûts pour restaurer le pont était de 4,5 millions de dollars et sa reconstruction, plus large et accessible, était quant à elle estimée à 5 millions de dollars. Pour le peu de différence de coût, je crois que nous devrions investir dans un pont qui répond aux besoins d’aujourd’hui.

La raison principale de revendiquer un nouveau pont est de pouvoir assurer une sécurité adéquate à mes concitoyens. C’est parfois une question de minutes pour sauver une vie et, avec un pont qui empêche les premiers répondants d’y circuler, on augmente le délai de réponse. On se connaît tous dans mon petit village et je ne souhaite pas entendre qu’une vie aurait pu être sauvée sans le détour du pont. Cet enjeu de sécurité ne concerne pas que les agriculteurs, il s’applique à tous les gens qui circulent ou habitent dans ce secteur de Saint-Valérien.

Un autre point non négligeable est l’aspect financier de l’entretien d’un pont avec cachet patrimonial plutôt qu’un nouveau pont. Le déblaiement de la neige devra s’effectuer avec un petit camion, obligeant la Municipalité à débourser des frais supplémentaires. L’entretien du tablier, très coûteux, revient également aux frais de la Municipalité. Dans un contexte d’inflation, d’augmentation des taxes et du fardeau des municipalités qui augmente sans cesse, qui aidera Saint-Valérien-de- Milton à absorber ces frais? Aucun argent du Patrimoine ne viendra amortir ces coûts pour tous les citoyens.

Ces derniers ont d’ailleurs signé une pétition sur laquelle on ne retrouve pas que des agriculteurs, car ils ne désirent pas conserver un pont à valeur patrimoniale. Le pont Provost à Acton Vale, rénové en 2019, a déjà été fermé à deux reprises parce qu’un camion semi-remorque y a circulé et abîmé un gabarit. Personne ne souhaite vivre ce qu’endurent les citoyens d’Acton Vale avec des fermetures récurrentes causées par un pont aux dimensions inadaptées.

Gardons en tête que le pont du Centre, sur le chemin de Saint-Dominique, est également en fin de vie et, advenant sa fermeture, où est-ce que les citoyens circuleraient? Le détour deviendrait très long et le pont du 10e Rang ne serait pas une option pour les services d’urgence.

Il faut avoir une vision à long terme dans ce dossier. Alors, oui, il serait pratique pour les agriculteurs de pouvoir circuler avec leurs imposantes machineries sur ce pont et d’éviter le détour par le village, mais il existe des raisons plus importantes qui ont penché dans la balance.

En terminant, j’aimerais revenir rapidement sur la lettre d’opinion du Devoir, publiée le 23 mai, et qui mélange deux débats en associant la qualité de nos sols et le pont. La façon de cultiver nos terres a bien changé et un producteur biologique a aussi besoin de circuler avec de grosses machineries. Les producteurs conventionnels ont amélioré leurs pratiques; il suffit de prendre le temps de s’y intéresser pour s’en rendre compte. Les agriculteurs sont fiers des actions qu’ils posent pour l’environnement et la qualité de leurs sols est primordiale pour eux afin que leur relève puisse aussi nourrir leurs concitoyens.

Cindy Beaudry, Saint-Valérien-de-Milton

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