11 avril 2024 - 03:00
Voisin de Sainte-Marie-Madeleine
Projet W.-Laurier : des chantiers dans la cour de résidents
Par: Sarah-Eve Charland
La nouvelle rue Andrée-Champagne prend forme dans le secteur Douville. On y trouvera de part et d’autre des immeubles à logements dans le cadre de la phase 1 du projet immobilier W.-Laurier. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

La nouvelle rue Andrée-Champagne prend forme dans le secteur Douville. On y trouvera de part et d’autre des immeubles à logements dans le cadre de la phase 1 du projet immobilier W.-Laurier. Photo Robert Gosselin | Le Courrier ©

Les arbres sont abattus massivement depuis le 12 mars. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Les arbres sont abattus massivement depuis le 12 mars. Photo François Larivière | Le Courrier ©

Le plan du projet W.-Laurier qui sera construit à la limite entre Saint-Hyacinthe et Sainte-Marie-Madeleine. Photo gracieuseté

Le plan du projet W.-Laurier qui sera construit à la limite entre Saint-Hyacinthe et Sainte-Marie-Madeleine. Photo gracieuseté

Plusieurs résidents de Sainte-Marie-Madeleine se sont réveillés un lundi matin avec la machinerie arrachant les arbres qui s’érigeaient à quelques pieds, si ce n’est pas moins, de leur terrain. Les terrains à l’arrière se situent toutefois sur le territoire de la Ville de Saint-Hyacinthe et cette dernière a accepté d’y construire un développement d’au moins 200 logements sans en aviser la Municipalité voisine.

La Municipalité de Sainte-Marie-Madeleine a reçu une simple communication du Service d’urbanisme de Saint-Hyacinthe un vendredi à 9 h 30 pour annoncer que les travaux d’excavation commençaient le lundi suivant. Dans ce courriel, on annonçait que le projet avait été autorisé par les élus et on suggérait à la Municipalité de lire les articles du COURRIER pour obtenir plus de détails. Les bureaux administratifs de la petite Municipalité sont toutefois fermés le vendredi en après-midi, ce qui a laissé très peu de temps à la Municipalité pour informer les citoyens concernés. Elle a pu organiser une rencontre d’information le lundi suivant en soirée.

« Ils [Saint-Hyacinthe] sont chez eux. Ils n’ont pas l’obligation de nous informer. On comprend ça, mais on aurait aimé qu’il y ait une réflexion pour respecter le voisinage. Les résidents touchés n’ont pas d’informations », déplore la mairesse de Sainte-Marie-Madeleine, Ginette Gauvin.

Le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard, assure que la direction générale de la Municipalité voisine a été informée en temps et lieu. « C’est à eux de répondre à leurs citoyens, répond le maire de Saint-Hyacinthe, André Beauregard. On en a assez de répondre aux nôtres. On leur a donné toutes les informations nécessaires. Ça n’aurait pas dû être une surprise pour personne. »

Rappelons qu’un nouveau quartier verra le jour dans le secteur Douville à Saint- Hyacinthe entre la limite de Sainte-Marie-Madeleine et le concessionnaire Baril Ford. La première phase du projet W.-Laurier se compose de 200 logements locatifs.

Au total, près de 2100 mètres carrés de milieu humide seront détruits. La Ville de Saint-Hyacinthe ne connaît pas le nombre d’arbres qui ont ou qui seront abattus pour la construction des trois phases. Selon le certificat d’autorisation du ministère de l’Environnement, 17 839,6 mètres carrés de milieu humide et de boisé seront protégés.

« Quand tu n’es pas habitué, on peut comprendre qu’il y ait un inconfort. En même temps, on est dans un développement résidentiel de moyenne densité dans une zone blanche. Quand tu achètes quelque chose, si ce n’est pas agricole derrière chez vous, c’est sûr que ça va se développer un jour », ajoute la directrice générale de Saint-Hyacinthe, Chantal Frigon.

Tout ce que Sainte-Marie-Madeleine souhaitait, c’était d’être incluse dans les discussions visant ce nouveau développement résidentiel avec la Ville de Saint-Hyacinthe. « Je ne veux pas faire de Saint-Hyacinthe un ennemi, mais on aurait aimé une plus belle collaboration. C’est sûr qu’on ne peut pas les empêcher de construire. Si on nous avait approchés au lieu de nous mettre devant le fait accompli, on aurait pu faire des propositions pour diminuer l’impact sur nos citoyens », souligne Mme Gauvin.

Développer dans l’indifférence

Voisin immédiat du vaste chantier, Jean-François de Muys abonde dans le même sens. « Ça s’est fait de manière cavalière. J’ai appelé la Ville de Saint-Hyacinthe pour obtenir des informations. On me répond que ce n’est pas de mes affaires. J’ai plein de questionnements et on est laissés à nous-mêmes. Pendant plusieurs nuits, je n’ai pas dormi. On aurait aimé le savoir à l’avance pour nous préparer », dénonce M. de Muys.

À l’arrière de son terrain, c’est la désolation la plus totale, dit-il. Des arbres ont été arrachés. On ne trouve que quelques arbres et de la boue. Les travaux sont tellement proches que les travailleurs ont abîmé des branches d’arbres sur son terrain. Aucune barrière ne sépare le chantier des cours résidentielles. « Je trouve ça triste. Il y avait de beaux arbres. Rien n’a été prévu pour séparer mon terrain. J’ai de jeunes enfants qui peuvent y aller », poursuit-il.

Un autre voisin, Mario Courtemanche, verra quant à lui un stationnement être aménagé à près de neuf mètres de son terrain. Des rumeurs de développement résidentiel circulent depuis qu’il a construit sa maison en 1998 et il avait d’ailleurs planté quelques sapins à l’époque en prévision, mais il ne pensait pas que tous les arbres des terrains voisins seraient coupés.

« Surtout, je pensais que ce serait des bungalows, pas des immeubles à logements. Je ne croyais pas que ce serait si gros. Même que dans le quartier, à Sainte-Marie-Madeleine, les multiplex sont interdits pour garder une intimité. Je sais que le projet se réalise dans une autre municipalité, mais on a des inquiétudes. Ce sont deux villes qui ne se parlent pas, deux mondes. C’est dommage », déplore M. Courtemanche.

Réjean Lussier s’estime le plus chanceux des malchanceux. Derrière chez lui, on trouvera le bassin de rétention du nouveau quartier. Il n’aura donc pas une vue directe sur les immeubles. « C’était vraiment un bel écosystème. Il y avait des grenouilles et des cerfs là-dedans. C’est triste. Mais le plus innocent dans tout ça, c’est que personne ne nous a avertis. Je suis allé voir l’entrepreneur et il ne peut même pas me donner d’informations. On ne sait rien de rien. »

Une barrière d’intimité

Le dernier espoir des résidents, c’est l’installation d’une barrière d’intimité qui pourrait prendre plusieurs formes, que ce soit des arbres, une haie ou même une clôture. « J’estime que ce n’est pas à moi de payer pour ça. Ils ont détruit le boisé. Je n’ai plus d’intimité. J’avais un spa. Oublie ça, je ne l’utiliserai plus », ajoute M. de Muys.

La Municipalité de Sainte-Marie- Madeleine a contacté le service d’urbanisme de la Ville de Saint-Hyacinthe pour demander l’installation d’une barrière d’intimité, mais en vain. La mairesse a donc tenté sa chance auprès du maire de Saint-Hyacinthe dans l’espoir de faire bouger les choses. Mais pour M. Beauregard, cela n’est pas une option. « On ne le fait même pas pour nos citoyens », conclut-il.

Nous avons tenté de joindre le promoteur responsable du projet immobilier W.-Laurier. Ce dernier n’avait pas rappelé au moment de mettre sous presse.

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