11 mars 2021 - 14:18
Propagation de COVID-19 à l’Hôtel-Dieu : des causes multiples sont avancées
Par: Maxime Prévost Durand
En plein cœur de la deuxième vague, des infirmières de l’Hôtel-Dieu de Saint-Hyacinthe avaient partagé cette photo pour manifester leur indignation envers le manque de personnel et d’équipement de protection adéquat en zone chaude. Photothèque | Le Courrier ©

En plein cœur de la deuxième vague, des infirmières de l’Hôtel-Dieu de Saint-Hyacinthe avaient partagé cette photo pour manifester leur indignation envers le manque de personnel et d’équipement de protection adéquat en zone chaude. Photothèque | Le Courrier ©

Comment expliquer la force avec laquelle la deuxième vague a frappé l’Hôtel-Dieu dans les derniers mois, alors qu’on avait l’opportunité de tirer des leçons de la première vague? La question est complexe et plusieurs explications sont avancées.

Le nombre de cas plus important globalement au Québec, dont à Saint-Hyacinthe, de même que l’augmentation des cas de personnes atteintes de la COVID-19 tout en étant asymptomatiques et le maintien des visites des proches aidants dans les centres d’hébergement sont des éléments qui peuvent expliquer en partie ce qui s’est produit à l’Hôtel-Dieu, a énuméré le conseiller aux relations médias du CISSS de la Montérégie-Est, Hugo Bourgoin, lorsque questionné à ce sujet.

La présence d’une zone chaude sur l’unité du Parc – qui accueille les cas de COVID-19 de l’Hôtel-Dieu, mais aussi certains provenant de résidences privées pour aînés notamment – n’aurait quant à elle pas joué un rôle dans la propagation, d’après le CISSS de la Montérégie-Est. « Pas selon les enquêtes épidémiologiques », a répondu M. Bourgoin.

Le président du Syndicat des travailleuses et travailleurs du CISSSME-CSN, Daniel Laroche, rappelle toutefois qu’il a continué à y avoir du mouvement de personnel à certains moments. « Bien que l’employeur ait tenté de limiter les déplacements, il y en a eu », a-t-il affirmé, ajoutant qu’un employé de zone froide envoyé en renfort en zone chaude pouvait parfois retourner en zone froide dès le lendemain parce que l’employeur considérait que la personne s’était lavée et qu’elle ne représentait donc pas de risque.

« Si on calcule le fait que l’employeur a maintenu certains déplacements, alors oui, il y a une probabilité qu’il y ait eu une transmission [à partir de l’unité du Parc vers d’autres unités]. Si cette unité-là [du Parc] n’avait pas été à l’Hôtel-Dieu, on aurait eu moins de problèmes, croit M. Laroche. Où aurait-il pu y avoir une unité chaude à la place? C’est l’employeur qui a ces cartes entre les mains. »

De son côté, la FIQ – Syndicat des professionnelles en soins de Montérégie-Est considère « multifactorielle » la situation qui a affecté l’Hôtel-Dieu depuis l’automne. « C’est difficile de mettre le doigt sur une chose seulement », a reconnu la présidente Brigitte Pétrie, consciente que « le virus a été plus agressif même dans la population ».

Cependant, elle dénote elle aussi des mouvements de personnel de zone chaude à zone froide survenus à l’occasion, même si ceux-ci doivent être évités. « Il manque tellement de personnel que, des fois, ils n’ont pas eu le choix », a soutenu Mme Pétrie.

Quant aux besoins de personnel, déjà criants avant la pandémie, l’arrivée des préposés aux bénéficiaires issus de la cohorte de formation accélérée a été plus que bienvenue, même si cela n’aura pas été une solution parfaite pour autant.

« Ça a fait une différence, mais il y avait encore de l’apprentissage à faire pour certains, a souligné le président du Syndicat des travailleuses et travailleurs du CISSSME-CSN. Ce n’est pas un blâme, ils ont dû apprendre vite vite. […] Ils pouvaient faire l’entièreté des tâches, mais il y avait une phase d’adaptation ou de formation prolongée, ce qui a pu ajouter une couche de travail additionnelle aux autres employés [qui devaient les aider]. »

On se souviendra également que des infirmières de l’Hôtel-Dieu avaient décrié la piètre qualité de l’équipement de protection qui leur était fourni, une situation qui a été corrigée immédiatement après leur sortie au début décembre.

« Il y avait une forme de préparation [de la part de l’employeur en vue de la deuxième vague], mais quand on voit l’état du matériel qu’on avait, on se dit qu’ils n’étaient peut-être pas si prêts que cela. Pourtant, ils avaient eu le temps de se préparer », a affirmé Mme Pétrie.

« [Le CISSS de la Montérégie-Est] a rejoué le même scénario que la première vague, avec les mêmes mesures, alors on ne pouvait pas s’attendre à avoir une fin différente », s’est pour sa part désolé M. Laroche.

Ce dernier a rappelé que la CSN réclamait depuis plusieurs mois un rehaussement des mesures de protection. Cela passait notamment par l’utilisation du masque N95, jusqu’ici réservé seulement lors de situation d’éclosions non contrôlées. Ce n’est que récemment, au début février, que la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a rendu le port du masque N95 obligatoire pour les employés en zone chaude.

Au début janvier, l’ensemble des résidents de l’Hôtel-Dieu a par ailleurs reçu le vaccin contre la COVID-19, amenant par la même occasion une dose d’optimisme après des mois difficiles. « C’est sûr que ça va aider », a concédé Daniel Laroche.

« On sait que ça va mieux maintenant. On espère seulement que le déconfinement [qui vient d’être entamé] n’amènera pas de troisième vague », a conclu Brigitte Pétrie.

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