Retour obligé sur le rapport de la Commission Charbonneau, après une semaine de recul et de réflexion. Tout n’est pas mauvais dans ce rapport, loin de là, mais il ne règlera pas à lui seul tous les problèmes de corruption.
Parmi les recommandations qui méritent d’avoir une suite, il y a certainement la numéro 6, à la page 105, qui suggère de « Resserrer les règles d’octroi de contrats applicables aux sociétés paramunicipales et aux organismes à but non lucratif (OBNL). » Pourquoi? Parce que, notent les commissaires, « des organismes gouvernementaux et des municipalités mettent sur pied des organismes à but non lucratif pour réaliser et gérer des activités à caractère artistique, social, sportif ou encore pour la réalisation d’un projet unique […] Ils subventionnent aussi des projets de construction planifiés et gérés par des OBNL ou des sociétés paramunicipales qu’ils ne contrôlent pas, parfois pour des montants de plusieurs dizaines de millions de dollars ». Devant la Commission, l’Unité permanente anticorruption s’était aussi dite préoccupée par la création et l’utilisation d’OBNL par des organismes publics « afin de faire indirectement ce qui ne peut être fait directement en matière contractuelle ».
Les commissaires ont donc recommandé au gouvernement « d’assujettir l’ensemble des sociétés paramunicipales et des OBNL contrôlés ou subventionnés par un organisme public ou une municipalité aux mêmes obligations contractuelles que les organismes auxquels ils sont liés. C’est sage, mais pas incontournable.
Encore faut-il savoir que les notions de contr��le et de subvention peuvent laisser place à bien des interprétations légales. Dans le cas de la défunte Cité de la biotechnologie, un OBNL privé, la Ville de Saint-Hyacinthe et la Cité ont fait valoir devant la Commission d’accès à l’information (CAI) que l’octroi annuel que versait la Ville à la Cité n’était en fait qu’une compensation pour la gestion des parcs industriels municipaux et non une subvention. On se souviendra aussi que la Cité, forte de son statut d’OBNL privé, a pu allègrement accorder des contrats de plus de 20 M$ pour la construction du centre de développement pharmaceutique sans procéder par appels d’offres publics, et ce, même si le projet était cautionné à la hauteur de 10 M$ par la Ville. La CAI a d’ailleurs conclu que la Ville de Saint-Hyacinthe n’avait aucun contrôle sur les affaires de la Cité.
On ne voit malheureusement pas grand-chose dans la recommandation 6 qui aurait pu permettre d’éviter de tels gestes de la part de la Cité. Pire encore, l’OBNL Saint-Hyacinthe Technopole, le nouveau bras économique de la Ville de Saint-Hyacinthe, n’est pas soumis à la Loi d’accès à l’information. Il peut donc agir comme bon lui semble sans se soucier de voir les journalistes mettre leur gros nez dans ses affaires, et sans rendre de comptes aux Maskoutains, même si cet organisme est financé à la hauteur d’un million de dollars par la Ville de Saint-Hyacinthe. C’est aberrant.
Outre les 60 recommandations de la Commission Charbonneau, il est grand temps d’assujettir les OBNL privés aux règles de la Loi d’accès à l’information pour les forcer à une plus grande transparence dans la manière dont ils dépensent VOTRE argent.