28 avril 2022 - 07:00
Réforme de la santé : les syndicats demeurent sceptiques
Par: Sarah-Eve Charland
Les syndicats du CISSS de la Montérégie-Est accueillent froidement la nouvelle réforme de la santé présentée par le gouvernement du Québec. Photothèque | Le Courrier ©

Les syndicats du CISSS de la Montérégie-Est accueillent froidement la nouvelle réforme de la santé présentée par le gouvernement du Québec. Photothèque | Le Courrier ©

Annoncé en grande pompe récemment, le Plan pour mettre en œuvre les changements nécessaires en santé a été accueilli froidement par les syndicats du personnel du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Montérégie-Est.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, a présenté une réforme qui se veut plus humaine et plus performante. Les syndicats reconnaissent l’effort. Ils ne rejettent pas du revers de la main l’ensemble du document. Bien au contraire, certains aspects leur plaisent comme la décentralisation et l’interdisciplinarité, mais certains doutes subsistent.

Pas de moyens concrets

Pour la représentante nationale de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), Joëlle Lavoie-Vigeant, l’absence d’échéancier clair pose problème. « On espère que ce n’est pas juste un exercice de relations publiques en vue des prochaines élections, mais qu’il y ait une réelle volonté politique d’améliorer les choses. On espère que le gouvernement va mettre en place des mesures rapidement parce qu’il y a une urgence d’agir. On espère qu’ils vont prioriser les mesures qui visent une meilleure organisation du travail. »

La Fédération professionnelle de la santé du Québec (FIQ) souhaitait y voir certaines priorités, dont la mise en place de moyens concrets pour éliminer le temps supplémentaire obligatoire, un encadrement strict de la main-d’œuvre indépendante et des consignes sur les ratios personnel-patients. « Le plan ne répond pas à l’ensemble de nos priorités. On ne mentionne pas les moyens pour y arriver. On ne mentionne pas les ratios professionnel-patient. On est déçus », admet la présidente Julie Bouchard.

La réforme met à l’avant-plan l’accès à une porte d’entrée unique pour la première ligne qui prendra la forme du Guichet d’accès à la première ligne. Parmi les actions proposées, on mentionne une décentralisation des pouvoirs. Le président du Syndicat des travailleuses et travailleurs du Centre intégré de santé et services sociaux de la Montérégie-Est-CSN, Daniel Laroche, déplore que les employés doivent traverser une nouvelle réforme même s’il accueille favorablement la décentralisation.

Mme Lavoie-Vigeant abonde dans le même sens. « Il n’y a pas énormément de mesures concrètes qui expliquent comment ça va se faire. Décentraliser peut être positif, mais pour nous, la démarche n’est pas claire. »

Le gouvernement s’est engagé à éliminer le recours au temps supplémentaire obligatoire (TSO). « C’est déjà une promesse qui a été faite il y a quatre ans, rappelle Julie Bouchard. Force est de constater que le temps supplémentaire obligatoire est toujours un fléau dans le réseau de la santé. On s’entend avec le gouvernement; il ne doit plus y avoir du TSO comme mode de gestion. Mais comment y arriver? Ça n’apparaît nulle part. »

Le gouvernement compte aussi miser sur une plus grande place du secteur privé, ce qui a notamment fait réagir les syndicats. Pour M. Laroche, prendre cette direction accentuera le fossé entre les secteurs privé et public tout en ouvrant la porte à un exode des employés.

« En chirurgie par exemple, les cas lourds se retrouvent dans le secteur public et les cas plus légers dans le secteur privé. Ça risque de générer un exode. Les travailleurs ne voudront pas gérer uniquement des cas lourds, affirme M. Laroche. Au privé, dans plusieurs situations, les gens seront en mesure d’améliorer leur sort. Au contraire, il faudrait diminuer la présence du privé pour ramener du monde dans le secteur public. Si on a plus de personnel, on sera en mesure d’offrir de meilleurs services. Ça passe notamment par l’élimination de la main-d’œuvre indépendante. »

Une plus grande collaboration demandée

L’APTS rappelle que la réforme n’est pas le résultat d’une collaboration avec les acteurs du réseau. « Notre plus grand souhait, c’est que la refonte du système soit faite en collaboration avec les organisations syndicales et les acteurs du réseau. Pour nous c’est primordial de le faire en collaboration avec les organisations syndicales pour trouver des solutions pérennes qui vont parler aux gens. Beaucoup d’employés ont vécu deux ou trois réformes. Il y a une perte de sens au niveau de leur travail », mentionne Joëlle Lavoie-Vigeant.

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