Étonnamment, c’est la première fois qu’on s’intéresse à la vie exceptionnelle de ce sportif devenu, grâce à ses victoires, le symbole de la nécessité de la reconnaissance et de l’égalité des droits civiques pour les Afro-Américains dans une Amérique encore très ségrégationniste. À cela s’ajoute le contexte du Troisième Reich, où Hitler prône depuis 1933 la suprématie de la race aryenne et blanche.
Le tout débute en 1934 alors que Jesse Owens (Stephan James) quitte sa femme et sa fille pour aller s’entraîner à l’Université de l’Ohio avec Larry Snyder (Jason Sudeikis), qui voit en lui un espoir olympique et qui le mettra à l’épreuve lors des mois qui suivront. Au même moment, le comité organisateur américain s’interroge quant à la présence des États-Unis aux Jeux sous le régime nazi, et menace de boycotter l’événement. Le pays prendra finalement part à la compétition après le retour de l’avocat Avery Brundage (Jeremy Irons), parti en Allemagne négocier un accord pour que les juifs américains et les Afro-Américains puissent y participer. En parallèle à Berlin, la réalisatrice Leni Riefenstahl prépare le tournage d’un documentaire sur les Jeux olympiques sous le regard suspicieux du ministre de la propagande, Joseph Goebbels.
La réalisation de Stephen Hopkins (Under Suspicion, The Reaping) reste très classique, mais efficace. Les artisans du film ont d’ailleurs reconstitué de façon fidèle les décors de l’Allemagne nazie, entre autres du stade olympique, et de l’Amérique pendant la Grande Dépression, alors qu’une partie du long-métrage a été tournée au Québec.
La force de 10 secondes de liberté demeure son scénario qui, au-delà du fait qu’il relate le parcours impressionnant de Jesse Owens, fait écho à des questions idéologiques, politiques et raciales cruciales à cette époque. Particulièrement, on s’attarde à un pan important dans l’histoire du cinéma, soit la conception du documentaire Les Dieux du stade (Olympia en allemand), une oeuvre qui devait en principe démontrer la grandeur de l’idéologie nazie, mais qui montre aussi la beauté et la puissance du sport et des athlètes peu importe leur origine.
L’ensemble de la distribution, mais surtout le Canadien Stephan James (Selma) et Jason Sudeikis (Horrible Bosses), surtout connu pour ses rôles comiques, offrent tous deux une performance sensible et sentie.
Le long-métrage, pour le jeu de ses acteurs, la profondeur de son scénario et les questions qu’il soulève, et son hommage nécessaire à Jesse Owens, devenu par la suite un héros, mérite les honneurs.