« Les carottes sont cuites, déplore Donald Côté. Mais je ne suis pas surpris. Le lobby du transport lourd est puissant. »
À l’été 2023, la députée de Saint- Hyacinthe, Chantal Soucy, avait annoncé que les camions lourds seraient bientôt interdits sur la rue des Seigneurs Est. Quelques semaines plus tard, le MTQ appelait à la prudence. C’est que Louise Milette venait d’entrer en fonction au poste de directrice générale de la Direction de la Montérégie Transport Québec et souhaitait faire le tour de la question avant de rendre une décision.
Selon une présentation du Ministère, dont nous avons eu copie, le MTQ estime que les inconvénients de modifier la route de camionnage dépasseraient largement les avantages. Au cours de la dernière année, le MTQ a rencontré sept entreprises de camionnage qui ont mentionné qu’elles prendraient la route 137 advenant une interdiction sur la rue des Seigneurs Est. Étant donné que le centre-ville n’est pas convivial pour la circulation des véhicules lourds, le MTQ a donc préféré maintenir le statu quo.
« Il était essentiel qu’une analyse de risques soit effectuée par des spécialistes. Les élus ne sont pas spécialistes en sécurité routière et il aurait été irresponsable de prendre une décision sans identifier les risques et évaluer les répercussions de tout changement à la réglementation. Les municipalités touchées par une modification doivent également être consultées. Plusieurs propositions ont été faites et le Ministère a dû procéder aux analyses de ces propositions. À ce jour, la Ville et le MTQ doivent finaliser un ou deux aspects pour, par la suite, rencontrer les citoyens. Je sais que certains citoyens sont impatients et je les comprends », mentionne Chantal Soucy.
Selon une analyse de la circulation effectuée en mai 2024, le débit journalier moyen est estimé à 6000 véhicules par jour, dont 1100 sont des camions lourds. Des relevés concluent que la limite de vitesse de 50 km/h est respectée.
Le taux d’accident sur le tronçon est inférieur au taux moyen pour les tronçons similaires, selon le document du Ministère. Le taux est de 1,43 par million de véhicules-kilomètre, comparativement à 2 accidents par million de véhicules-kilomètre en 2020-2022.
Une étude sur les vibrations a aussi été réalisée par le MTQ en février 2023. Bien que le niveau de vibration soit incommodant et irritant pour les résidences situées à moins de sept mètres de la chaussée, le Ministère considère que les vibrations sont insuffisantes pour causer des dommages, même cosmétiques. Environ 45 bâtiments sont situés à moins de 7 mètres de la rue.
« Nous concluons que, bien que le retrait du camionnage sur la route 224 soit considéré pour les riverains de ce secteur comme une avenue souhaitable pour eux, la présence accrue du camionnage sur les routes alternatives contribuerait à l’augmentation des nuisances pour les autres secteurs », a souligné Louise Milette dans une communication transmise aux représentants de la Ville de Saint-Hyacinthe.
Discussion unilatérale
L’étude de l’impact acoustique réalisée par la Ville en 2022 ne semble pas avoir eu de poids dans la décision du Ministère. Selon ce document, le bruit constant du trafic lourd dépasse largement ce qui est considéré comme acceptable et ne propose aucun répit aux résidents du secteur. Il dépasse même la Politique sur le bruit routier publiée par le MTQ qui établit le niveau de bruit maximal acceptable pour les zones résidentielles.
« Tout ça pour ça, ajoute la résidente Andrée Corbeil. C’est décevant. Je veux savoir ce que le Ministère propose comme solution. C’est bien beau rédiger des rapports, mais ça prend des solutions! Il n’y a jamais eu de rencontre avec les citoyens. Le Ministère a consulté les municipalités et les entreprises, mais jamais les riverains », dénonce-t-elle.
Au printemps 2022, la Ville avait proposé de former un comité tripartite, incluant des citoyens et des représentants du Ministère. Deux ans plus tard, aucune rencontre ne s’est tenue. « On sollicitait le MTQ pour tenir des rencontres avec des citoyens, mais on était à leur merci. Le MTQ mentionnait que ça ne servait à rien de parler à des personnes converties. […] La route est sous leur juridiction. Ils nous écoutent, mais ils n’en font qu’à leur tête », ajoute M. Côté.
Au moment de mettre sous presse, le MTQ n’avait pas répondu aux questions du COURRIER.