L’ancien maire Simon Lacombe, qui a consacré 44 ans de sa vie aux affaires municipales de sa petite paroisse, est décédé le 21 décembre au matin à l’âge de 82 ans. Entouré des siens, il s’est éteint à l’Hôpital Charles-LeMoyne où il séjournait depuis le 30 novembre.
En entrevue au COURRIER, son fils Jean-Pierre ne s’est pas fait prier pour rendre hommage à son paternel qu’il a décrit comme un homme de famille qui n’avait que trois passions dans la vie : sa famille, l’agriculture et sa municipalité.
« Mon père était un travaillant et un homme honnête, intègre. Il gérait serré et il connaissait sa municipalité et son réseau d’aqueduc comme le fond de sa poche. Il avait un grand réseau de contacts. Je suis un peu abasourdi par tous les messages de sympathies que nous recevons depuis son décès. Le téléphone n’arrête pas ici, ça rentre de partout. Il ne laissait personne indifférent. »
Un vrai politicien
Aux dires de Jean-Pierre Lacombe, son père a toujours fait de la politique pour les bonnes raisons. « En politique, m’a un jour expliqué Bernard Landry, il y a ceux qui font de la politique et d’autres de la politicaillerie. Mon père était un politicien, mais dans ses dernières années à la mairie, il a été entouré de certaines gens qui faisaient de la politicaillerie. »
Avec ce décès, ce n’est pas seulement une page du grand livre d’histoire de Sainte-Marie-Madeleine qui se tourne, mais un chapitre au complet qui se termine.
Et quel chapitre! Simon Lacombe aura marqué l’histoire politique locale et régionale comme nul autre avant lui. Quand il s’est retiré de la politique active juste avant les élections de novembre 2017, il a stoppé le compteur à 44 ans de politique municipale, dont 37 ans de règne ininterrompu à la mairie de Sainte-Marie-Madeleine.
« La Municipalité perd un homme passionné, vaillant et très impliqué, a mentionné Ginette Gauvin, mairesse de Sainte-Marie-Madeleine. Il n’y en aura pas un deuxième comme lui. Même s’il ne faisait plus de politique active depuis 2017, il appelait encore régulièrement la directrice générale pour se tenir au courant. Il n’était pas avare de ses opinions et de ses conseils. Nous allons trouver un moyen de lui rendre l’hommage qu’il mérite lors d’une prochaine réunion du conseil. Il va nous manquer. »
Celui qui avait d’abord été élu comme conseiller en 1973 s’était lancé en politique sur un coup de tête, pour une niaiserie, confiera-t-il des années plus tard au COURRIER, dans l’espoir de mettre fin au débordement du ruisseau situé en face de chez lui. Il comptait retourner à ses petites affaires une fois ce problème réglé. Il a plutôt collé au bureau municipal et s’est présenté aux élections à la mairie en 1980 le temps de terminer le mandat du maire démissionnaire Normand Palardy. Et les mandats se sont succédé jusqu’à sa retraite quelque 37 années plus tard pour des raisons de santé.
Émotif, il avait dressé un bilan on ne peut plus positif de sa carrière politique. « J’ai commencé avec de gros dossiers, comme le pont sous la voie ferrée (route 116) pour l’égouttement des terres, le développement des loisirs et l’arrivée du Centre d’insémination artificielle du Québec. J’ai toujours répondu aux citoyens 24 heures par jour, et promenez-vous sur nos routes, vous ne verrez pas un seul nid-de-poule. »
C’est parce qu’il a été freiné dans son élan par la maladie et l’amputation d’une jambe qu’il avait décidé de laisser sa place. Sans cela, plusieurs observateurs de la scène municipale suspectent qu’il y serait toujours. « Faire 800 ou 900 portes arrangé de même [en référence à son handicap], je n’aurais pas pu. Pour gagner une élection, il faut que tu sortes », avait-il confié au journaliste du COURRIER à l’automne 2017.
Contre les fusions
Du côté politique, on retiendra des années Lacombe la farouche opposition qu’il a toujours manifestée à l’égard des fusions municipales, dont spécialement celle avec le village de Sainte-Madeleine, un dossier qui s’est invité à quelques reprises à la table du conseil ces dernières années. « Dans mon livre, elle ne se fera jamais, on perdrait beaucoup trop d’argent », avait-il prédit au moment de sa sortie.
Déjà en 1999, M. Lacombe avait annoncé ses couleurs en affirmant se présenter comme le candidat contre la fusion aux prochaines élections de 2001, prêt à se battre contre les fusions forcées imposées par le gouvernement du Québec.
Mairesse du village de Sainte-Madeleine au début des années 2000, Denise Graveline a eu maintes fois l’occasion de débattre avec son homologue de la paroisse. « Nos relations ont parfois été tendues, car tous les deux nous protégions les intérêts de nos municipalités respectives. Il ne donnait pas sa place, mais c’était de bonne guerre et ce n’était jamais des attaques personnelles. Il était un chic type. »
Reconnu pour ses déclarations imagées, voire incendiaires, le maire avait qualifié cette idée de fusion avec la paroisse comme « une insulte à son peuple ». Il voyait la fusion comme le premier pas forcé « vers une grosse organisation du type d’avoir un DG avec un char fourni ». Il promettait même d’aller jusqu’en Cour suprême pour s’opposer à la fusion. « Dans sa logique, mon père était à la tête d’une Municipalité efficace, d’une machine qui marche rondement et qui ne coûte rien. Pourquoi changer ça? », raconte Jean-Pierre Lacombe.
Un autonomiste
Au niveau économique, Simon Lacombe s’était même dit prêt à faire cavalier seul et à tourner le dos au Centre local de développement en nommant son propre commissaire industriel municipal. Au niveau régional, il s’était aussi opposé à la création d’un poste de directeur général à une certaine époque ainsi qu’à la centralisation de pouvoirs vers les MRC. Cela ne l’avait pas empêché d’y présider le comité d’aménagement ainsi que le comité consultatif agricole. Il a aussi occupé le poste de préfet suppléant pendant moult années, se souvient avec bonheur l’ancien préfet de la MRC des Maskoutains, Francine Morin. « Je conserverai le souvenir d’un bon collègue et d’un bon collaborateur, dit-elle. C’était un homme passionné qui aimait sa municipalité et qui savait défendre son point de vue. »
Même son de cloche du côté du préfet actuel de la MRC et maire de Saint-Simon, Simon Giard. « On vient de perdre une légende, un homme de fer, a-t-il confié tout de go au COURRIER. Il avait son franc-parler. M. Lacombe avait sa municipalité tatouée sur le cœur. Il aimait ça, la politique, et c’était très plaisant de travailler avec lui. C’est moins connu, mais il était tout un agriculteur également. Il a mis sur pied une belle entreprise agricole, mais on en parle moins. Puisqu’il était ben chum avec mon père Hermel, j’ai toujours eu de bons contacts avec lui. C’est une grosse perte pour la région. »
Le phénomène Lacombe
Pas très chaud à tout regroupement, le maire Lacombe avait aussi boudé pendant très longtemps le concept de la régionalisation des déchets. Il aura fallu attendre 20 ans après la création de la Régie intermunicipale d’Acton et des Maskoutains (RIAM) pour que la paroisse de Sainte-Marie-Madeleine se décide à joindre ses rangs, à titre de 23e et dernier membre en règle de l’organisme de gestion de déchets.
Conseiller municipal à la Ville de Saint-Hyacinthe depuis 1988, Bernard Barré a eu l’occasion de croiser la route de Simon Lacombe à quelques reprises à la MRC et à la RIAM. Il appréciait sa couleur particulière. « Il était toujours de bonne humeur et très divertissant. J’aimais sa présence, car la politique peut parfois être un peu plate, mais lui ne l’était jamais. Il était drôle et donnait toujours un bon show, on l’a même vu quelques fois à l’émission Infoman. C’était tout un phénomène et ce qu’il a réussi en faisant de la politique aussi longtemps est justement phénoménal. On ne demeure pas en politique et encore moins maire aussi longtemps que lui si on n’est pas compétent et apprécié », dit celui qui aspire à surpasser M. Lacombe en matière de longévité politique.
Les funérailles de Simon Lacombe seront célébrées le 6 janvier à l’église de Sainte-Madeleine à 14 h, où la famille recevra les condoléances dès midi. Il sera aussi exposé à la Résidence funéraire Maska de Saint-Hyacinthe la veille de 13 h à 16 h et de 18 h à 21 h.