La principale ligne de défense de Jean-Pierre Bédard est la suivante : « Il n’y a jamais de bon moment pour rénover un siège social. »
Il a raison sur ce point. Il n’y a jamais de bon moment non plus pour développer un cancer et l’annoncer à ses proches.
Mais j’aurais envie d’ajouter que s’il n’y a jamais de bon moment pour revamper un siège social au coût de 12 M$, il y en a parfois des moins pires que d’autres. Et il y a aussi la manière de présenter et de défendre l’initiative.
En ce qui concerne le moment choisi, le CSSSH est très mal tombé, disons-le comme ça. Ces rénos nous arrivent après un automne chaud, des négociations difficiles avec les enseignants et dans un contexte de pénurie de ressources humaines et financières dans nos établissements.
Des écoles qui, soit dit en passant, ne paient pas de mine, comme en fait foi l’indice de vétusté du parc immobilier du CSSSH qui démontre que 60 % des bâtiments sont dans un état insatisfaisant. Malgré les investissements annuels affectés à leur remise en état, ceux-ci sont nettement insuffisants. Sur le territoire du CSSSH, on estime qu’il faudrait investir plus de 230 M$ pour remettre les 57 immeubles en bon état. Alors, considérant qu’on affectera 12 M$ de l’enveloppe de 20 M$ réservée au maintien d’actifs aux rénos du siège social, ce n’est pas cette année qu’on fera un grand rattrapage dans nos écoles.
Maintenant, en ce qui concerne la pertinence des travaux au siège social, on comprend des propos de M. Bédard à ce sujet qu’une intervention s’imposait au sous-sol de l’établissement, vu un sinistre passé. L’assureur a versé une indemnisation de 2 M$ pour la remise en état, ce qui donnait un excellent prétexte à la direction générale pour étendre les travaux selon le principe du « tant qu’à faire », un mal que tous les propriétaires qui ont déjà rénové leur résidence connaissent trop bien. D’où la facture de 12 M$.
Au lieu de se contenter de refaire le sous-sol et de changer les fenêtres du siège social, des rénovations jugées prioritaires, on a plutôt étendu le chantier à tout l’immeuble, ce qui attire davantage l’attention qu’une rénovation par étapes soigneusement étalée dans le temps. Ce qui étonne dans tout cela, c’est de constater que cette décision semble n’avoir soulevé aucun débat à l’interne.
En entrevue, le directeur général a mentionné qu’il revenait à la direction générale de définir les grandes orientations et au conseil d’administration de les entériner, ce qui a été fait le printemps dernier. Et les administrateurs ont approuvé comme de bons béni-oui-oui, aurais-je envie de suggérer.
Nous aurions souhaité le vérifier et pouvoir en discuter avec la présidente du CA, Elen Bourgeois, mais cela nous a été refusé, sous prétexte que les présidents ne sont plus porte-parole des centres de services scolaires depuis l’adoption de la Loi 40 en 2020. Cela en dit long sur le rôle accessoire, voire inutile, des conseils d’administration des centres de services scolaires.
D’autant plus qu’en décembre, avec l’adoption de la Loi 23 sur la gouvernance scolaire, la seconde réforme en moins de quatre ans, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, s’est octroyé le plein pouvoir de nommer les directeurs généraux des centres de services scolaires, de casser leurs décisions et de les limoger.
En ce qui concerne les travaux au siège social à Saint-Hyacinthe, il n’a de toute évidence pas eu envie de s’en mêler, au risque de s’emmêler. Je ne peux pourtant pas m’empêcher d’être nostalgique et de penser qu’un tel dossier aurait été mené bien différemment à l’époque des commissions scolaires. Il se serait certainement trouvé quelques commissaires pour challenger le DG sur ces « tant qu’à faire » et pour l’éveiller aux sensibilités et aux préoccupations du milieu.
Oui, j’aurais bien aimé assister au débat sur ces rénos de 12 M$ dans le temps des Richard Flibotte, France Martin, Jacques Favreau, Raymonde Rivard, Ginette Avard-Forand, Nicole Dion Audette, Marc Daoust, Luc Pelland et compagnie.
Car il y avait matière à en débattre et débat il y aurait eu. Un bon à part ça.