4 janvier 2024 - 03:00
Histoire d'ici
Télesphore-Damien Bouchard, député provincial (1912-1919 – 1923-1944) (2)
Par: Le Courrier
Discours de Bouchard devant l’Association des manufacturiers canadiens, vers 1930. Photo Fonds CH354, T.-D. Bouchard

Discours de Bouchard devant l’Association des manufacturiers canadiens, vers 1930. Photo Fonds CH354, T.-D. Bouchard

En 1917, le maire de Saint-Hyacinthe, René Morin, démissionne de façon plutôt abrupte. Dans ses mémoires, T.-D. Bouchard affirme qu’Armand Boisseau, le notaire associé à l’étude de Morin, avait mis le maire dans l’embarras en cherchant à faire adopter un règlement municipal de façon à faire obtenir un contrat à un entrepreneur montréalais de ses amis. Nous reparlerons un peu plus loin de M. Boisseau.

Bouchard devient donc maire de Saint-Hyacinthe en 1917. Il occupera ce poste jusqu’en 1944 avec une courte éclipse de 1930 à 1932. Il est déjà député libéral au provincial depuis 1912. Bouchard se sert souvent d’un de ses rôles pour servir de levier à l’autre. Par exemple, aussitôt élu à la Ville, il lève de nouvelles taxes, ce qu’il avait lui-même rendu possible grâce à la nouvelle charte qu’il avait fait adopter à l’Assemblée législative.

Bouchard est un type bouillant qui se fait assez facilement des adversaires. Il le sait et c’est pourquoi il use parfois de ruse pour obtenir ce qu’il veut en Chambre. Par exemple, il demande à Wenceslas Lévesque, un collègue mieux vu que lui des milieux cléricaux, de présenter un projet de loi permettant aux parents démunis d’envoyer leurs enfants à l’école même s’ils n’avaient pas payé leurs taxes scolaires. La loi présentée par Lévesque passa facilement. T.-D. est convaincu que lui-même n’y serait pas parvenu.

Armand Boisseau, celui-là même dont les agissements ont poussé le maire Morin à démissionner en 1917, fait le projet de ravir le siège de Bouchard lors des élections provinciales de 1919. Grâce au journal Le Courrier, dont il s’est porté acquéreur, il monte une cabale contre Bouchard, pourtant choisi candidat officiel à l’investiture. Après avoir sondé ses appuis, et surtout après avoir constaté que le premier ministre Lomer Gouin n’appuyait que tièdement la candidature de Bouchard, Boisseau se présente contre lui comme candidat libéral indépendant. Il remporte le comté par une majorité de 500 voix.

Cette défaite laisse un goût amer à Bouchard qui soupçonne rapidement son adversaire de malversations. En effet, il devient vite évident que la campagne menée par Boisseau a coûté très cher. T.-D. Bouchard porte plainte et exige une enquête. Il appert que l’argent investi par Boisseau dans sa campagne électorale fut amassé de façon frauduleuse. C’est ainsi qu’en février 1922, il démissionne de son poste de député. L’élection elle-même est annulée le 22 mars de la même année. Au bout d’un procès retentissant, Boisseau est condamné à deux ans de prison qu’il purge au pénitencier Saint-Vincent-de-Paul.

T.-D., en plus de ses occupations politiques, était un homme d’affaires aguerri. Outre son journal, Le Clairon, il posséda, entre autres, une agence de vente de véhicules automobiles, l’Hôtel Canada et, surtout, le Théâtre Corona, baptisé ainsi en l’honneur de sa femme, qui fut inauguré le 1er mai 1916. Il négociait également des transactions de toutes sortes, notamment dans le domaine immobilier. À ses détracteurs qui prétendaient que ses activités commerciales entraient en conflit avec ses fonctions, il répondait que « l’état de député honnête paye si peu, que pour ne pas être un député malhonnête, je suis obligé de pratiquer diverses professions ».

Bouchard était un homme patient et tenace. C’est ainsi qu’il tint tête à Louis-Alexandre Taschereau dans plusieurs dossiers qui lui tenaient à cœur, mais qui déplaisaient au premier ministre. Il parvint à municipaliser progressivement l’électricité afin de protéger le public contre les prix excessifs établis par l’entreprise privée. Il présenta également, entre autres exemples, un projet de loi en vue de l’institution d’un régime de pensions de vieillesse.

À suivre…

Par Martin Ostiguy, membre du Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe

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