Pour arriver à ses fins, le Conseil de Fabrique a publié un appel d’offres inusité dans Le Reflet du mois de septembre, la revue d’information mensuelle publiée et distribuée par la Municipalité de Saint-Liboire. On peut y lire qu’elle offre en location aux fins de culture pour une période de trois ans un vaste terrain d’une superficie de 24,6 hectares situé sur la rue Lacroix. Pour ceux qui ne sont pas habitués avec les hectares comme unité de mesure, précisons que cette terre agricole représente l’équivalent d’environ 50 terrains de football.
Les producteurs intéressés doivent s’engager à respecter une série d’obligations, précise l’avis, dont entretenir la terre et les fossés, assumer le paiement des taxes municipales et scolaires, respecter les normes environnementales en matière de culture et d’épandage et s’engager à ne pas s’adonner à des cultures illégales. Le loyer annuel est payable le 1er février de chaque année, dès la prochaine année.
Enfin, au terme du bail, l’exploitant devra s’engager à remettre la terre dans le même état qu’elle se trouvait à l’entrée en vigueur du contrat de location. Aucun détritus ni vidange ne sera toléré sur le terrain.
Les soumissions doivent être déposées au plus tard le 7 décembre.
C’est le lendemain, lors de l’assemblée ordinaire du Conseil de Fabrique prévue à la sacristie, que les soumissions seront ouvertes. Par prudence et comme il est d’usage avec les appels d’offres traditionnels, le Conseil de Fabrique ne s’engage pas à accepter la plus haute, ni la plus basse, ni aucune des soumissions reçues.
Au rôle d’évaluation de la Municipalité de Saint-Liboire, la terre agricole à l’enjeu tient sur deux lots distincts qui sont tous les deux la propriété de la Fabrique. La valeur de l’ensemble est estimée à 476 700 $. Cette terre agricole est actuellement exploitée et sous la responsabilité des Cultures Dion, une ferme du rang Charlotte à Saint-Liboire.
Un bon placement
Selon nos recherches, la terre de 24,6 hectares située à l’extrémité de la rue Lacroix a été acquise par la Fabrique de Saint-Liboire en décembre 1986. L’acte de vente rédigé par le notaire Jean-Robert Cardin mentionne qu’elle a payé la somme de 35 000 $ à son propriétaire de l’époque, Gérard Gosselin, pour l’ensemble des lots.
En entrevue au COURRIER, le président du Conseil de Fabrique de la paroisse de Saint-Liboire, Yves Taillon, a expliqué que cet achat avait été fait dans l’idée d’agrandir le cimetière de la paroisse, un projet qui n’a jamais eu de suite. La location de la terre est une idée temporaire qui perdure depuis ce temps, à la satisfaction de tout le monde.
« Pour nous, c’est un peu le meilleur des mondes, estime M. Taillon. Cette location nous procure un revenu récurrent tout en nous libérant de nos obligations et des charges qui viennent avec le fait d’avoir un bien aussi important. C’est une source de revenus qui nous permet de voir au bon entretien de l’église qui profite à toute la communauté. »
Le président de la Fabrique mentionne qu’il n’a jamais exploré la possibilité de se départir de cet actif à bon prix et qu’il n’a jamais été question d’entreprendre des démarches de changement de zonage devant la Commission de protection du territoire agricole du Québec. Il faut savoir que cette terre agricole est stratégiquement située puisqu’elle se trouve adossée à la zone urbanisée de la paroisse de Saint-Liboire.
Selon Sylvain Trépanier, une référence dans le monde immobilier agricole, une terre de bonne qualité, drainée et nivelée, se vend facilement entre 30 000 et 40 000 $ l’hectare sur le marché. « Les terres de Saint-Liboire sont reconnues et le marché est très bon.
C’est le genre de transaction que je pourrais conclure en une semaine tout au plus », assure le courtier à la tête du Groupe Trépanier Maxxum 100 Centre de Danville.
Au prix moyen de 35 000 $ l’hectare, la Fabrique pourrait en tirer facilement 875 000 $, note ce dernier, si bien sûr elle était disposée à s’en départir. Ce qui n’est pas le cas. « Nous ne souhaitons pas gérer des placements, répond Yves Taillon, nous préférons la simplicité. Notre formule nous convient et il n’y a pas d’urgence à l’heure actuelle. »
À cet effet, la Fabrique de Saint-Liboire semble confortablement assise sur un actif dont la valeur ne cesse de s’apprécier. Dans son plus récent examen de mi-année, Financement agricole Canada (FAC) souligne que la valeur moyenne des terres agricoles au pays a encore augmenté de façon constante au cours du premier semestre de 2021, bien que l’impact de la sécheresse généralisée de cet été n’ait pas encore été pleinement mesuré.
La valeur moyenne des terres agricoles canadiennes a grimpé de 3,8 % au cours de la première moitié de 2021, comparativement à une hausse moyenne de 3,7 % pour la même période l’année dernière. Au Québec, la hausse a été encore plus marquée puisqu’elle a atteint 8,1 % au cours des six premiers mois de l’année. Sur un an, en se basant sur les valeurs de juillet 2020, la variation atteint 13,7 % à travers la province.
« Pendant la première moitié de 2021, la valeur des terres a continué de grimper dans la plupart des régions, même dans celles qui affichent les prix les plus élevés par acre (Montérégie et Lanaudière). On note une diversité d’acheteurs dans la plupart des régions, ce qui suscite une vive concurrence pour le nombre limité de terres disponibles sur le marché », notent les analystes de marchés de FAC.
Le président de la Fabrique de la paroisse de Saint-Liboire n’a pas souhaité révéler les revenus qu’elle engrangeait grâce au contrat actuel de location qui tire à sa fin, dans l’espoir d’obtenir les soumissions les plus généreuses possible au terme du processus d’appel d’offres en cours.
Réponse le 8 décembre, si Dieu le veut!