L’année 2019 se sera plutôt soldée par un déficit de 1,87 M$ pour cette filière municipale. C’est encore plus que l’année précédente (2018), qui constituait la première année depuis la mise en marche complète de l’usine, et ce, même si les prévisions avaient été revues à la baisse depuis.
La majeure partie de ce déficit (-1,33 M$) provient des frais de financement liés à la dette contractée pour réaliser le projet, mais contrairement à 2018, les opérations courantes de l’usine ont également été déficitaires en 2019 (-0,54 M$). Le facteur déterminant dans ce résultat est la vente de gaz à Énergir, qui n’a atteint qu’à peine 179 000 $, au lieu d’une prévision de 1,5 M$. Toutefois, en tenant compte d’une correction comptable apportée au bilan, les ventes réelles auraient plutôt été de 469 000 $ en 2019, indique une note au document. C’est tout de même plus de trois fois sous les prévisions.
Qu’est-ce qui cloche?
En entrevue au COURRIER, le directeur général de la Ville, Louis Bilodeau, a expliqué que de nouveaux bris d’équipements attribuables au gel se sont produits au début de l’année 2019, stoppant complètement la production durant près de quatre mois. La reprise s’est ensuite effectuée très prudemment, et donc à un rythme de production plus lent que prévu. Lorsque l’usine ne peut produire du gaz naturel, elle doit tout de même traiter les déchets organiques qui continuent d’arriver à l’usine. Le produit est alors simplement brûlé à la torchère, a indiqué M. Bilodeau.
Le gel d’équipements en période hivernale était précisément la raison évoquée par la Ville il y a un an pour expliquer encore une fois les résultats décevants de l’usine. Le directeur général a toutefois assuré qu’il ne s’agissait pas des mêmes équipements qui avaient à nouveau fait défaut. Bref, ces inconvénients ne devraient pas être récurrents, mais sont plutôt le résultat d’un long processus pour adapter cette technologie européenne à notre climat, chose qui serait maintenant en bonne partie réalisée. C’est notamment ce à quoi faisait référence le maire Claude Corbeil quand il disait qu’il a fallu « apprivoiser la bête » durant la période de rodage de l’usine de biométhanisation, qui s’est de toute évidence étirée plus longtemps que prévu.
Même si la situation se répète depuis maintenant deux ans, le directeur général dit aujourd’hui avoir « pleinement espoir » que ces problèmes sont derrière nous. Pour l’année en cours, il est raisonnable de croire que la filière de biométhanisation pourra dégager des surplus d’opération et éponger une partie des frais de financement (comme en 2018), selon le DG. Pour des surplus nets, il faudra sans doute attendre 2021, a-t-il toutefois ajouté.
Pas le juste prix
Un autre pépin qui continue de peser sur la rentabilité de l’usine concerne le prix d’achat du gaz naturel par Énergir. Il était initialement prévu que le gaz injecté par Saint-Hyacinthe dans le réseau de l’entreprise soit payé à un tarif supérieur. Contrairement au gaz naturel ordinaire, celui-ci est en effet produit à partir de déchets organiques et est donc renouvelable.
Or, après plusieurs reports de décision, la Régie de l’énergie n’a toujours pas fixé ce tarif à l’heure actuelle, ce qui fait que la Ville ne reçoit que le prix régulier. C’est significatif puisqu’on parle d’une différence du simple au double, voire au triple selon les cours du gaz, évalue Louis Bilodeau. Le manque à gagner pourrait toutefois être payé rétroactivement lorsque cette question sera enfin réglée, a-t-il soulevé, ce qui pourrait éventuellement représenter une rentrée d’argent importante pour la Ville.
En attendant, la grande majorité des revenus de l’usine proviennent plutôt des tarifs perçus auprès des entreprises pour traiter leurs déchets organiques. Ceux-ci sont davantage au rendez-vous, avec un apport de 2,72 M$ pour l’année 2019, ce qui est tout de même 0,5 M$ de moins que les prévisions budgétaires.
Au chapitre des frais d’opération, rappelons que le problème qui perdure avec le traitement des bacs bruns des citoyens demeure la dépense principale de toute la filière. Il en coûte en effet tout juste 1 M$ pour trier ces matières et les faire transporter jusqu’en Estrie, où elles sont ensuite valorisées dans un site de compostage.
Le plan de match initial, qui était de transformer en gaz naturel les déchets organiques des citoyens de la région, n’est effectivement pas encore une réalité. Ces matières sont en bonne partie des résidus verts (branches, gazon et feuilles) peu efficaces pour la biométhanisation et la contamination par d’autres matériaux inorganiques a aussi été un problème.
Toute la gestion du contenu des bacs bruns risque toutefois d’être revue avec l’échéance de l’entente conclue avec la MRC des Maskoutains, prévue à la fin de la présente année. C’est en vertu de cet accord que Saint-Hyacinthe doit traiter le contenu des bacs bruns des municipalités voisines. La Ville-centre et les municipalités de la région ne se sont toujours pas entendues pour la suite.