11 mars 2021 - 14:41
Un an de pandémie
Triste jour
Par: Martin Bourassa
La pandémie de la COVID-19 a un an et personne n’a le cœur à la fête. Il y a un an jour pour jour, l’Organisation mondiale de la santé décrétait l’état de pandémie en déplorant le fait que le virus avait déjà contaminé plus de 75 000 personnes et provoqué 4635 morts dans le monde. Le compteur s’est ensuite affolé. Il tourne toujours.

Au plus récent décompte, nous étions rendus à près de 35 millions de cas positifs sur la planète et à plus de 1 million de morts, de sources officielles. On peut présumer que la réalité est plus sombre vu la difficulté à obtenir l’heure juste sur l’état de la pandémie dans certains pays. De façon plus microscopique, le bilan régional témoigne de plus de 4000 cas dans la MRC des Maskoutains et de 185 décès depuis un an. Nous avons donc eu notre part de victimes nous aussi. Nous partageons plein de deuils.

Ces chiffres donnent une certaine mesure du drame qui perdure, mais au-delà des calculs mathématiques et des statistiques, on parle ici d’êtres humains, d’hommes et femmes, de grands-pères ou de grands-mères, de pères ou de mères, de frères ou de sœurs. Il y a des visages, parfois trop familiers, derrière ces chiffres. Ne l’oublions jamais.

Pour préparer cet éditorial et cette édition anniversaire, je suis retourné à nos archives, à la recherche de visages marquants et de mots marquants. Les visages maskoutains de la pandémie d’abord, ceux que nous avions mis en lumière et que nous avons cru bon revisiter, question de témoigner du chemin parcouru. Pour prendre la mesure du temps passé, du temps perdu et du temps qu’il faudra rattraper demain.

Les mots ensuite. J’ai relu ceux que j’exprimais il y a un an sans savoir ce qui nous pendait au bout du nez. Mais j’évoquais la certitude que nous parlerions un jour de l’avant et de l’après-pandémie, que ce serait un nouveau marqueur de temps dans la classification de nos souvenirs personnels et collectifs, une référence historique.

Face aux décès beaucoup trop nombreux dans les CHSLD, je déplorais ensuite l’angle mort. Ces efforts accélérés pour vider nos hôpitaux et paqueter nos centres d’hébergement où l’on entassait et regroupait sur des unités mi-chaudes mi-froides, faute d’options, d’informations et de certitudes, les personnes âgées plus vulnérables. Avec le recul, ce fut un désastre, même s’il est bien facile en ce moment de jouer au gérant d’estrade.

À plus d’une reprise aussi, il m’apparaissait évident que le fameux retour à la normalité ne viendrait qu’avec la recherche et le développement de médicaments ou de vaccination. Pour notre plus grand bonheur, les vaccins n’ont pas pris un an à arriver. Un exploit!

À l’heure de ce bilan anniversaire, les textes les plus bouleversants à lire ces jours-ci émanent de familles qui ont vu un de leur proche s’éteindre dans la solitude malgré les efforts des anges gardiens bienveillants. L’idée de tenir à distance les aidants naturels et les proches dans ces moments difficiles de la première vague n’a pas aidé. Et elle n’a pas été répétée, preuve que la machine a su apprendre de ses erreurs. Des erreurs, il s’en est commises aussi lors de la seconde vague. Je veux bien croire que la COVID-19 et ses variants ont frappé fort, mais quand je regarde le bilan des morts à l’Hôtel-Dieu et dans certaines résidences privées, je me dis que nous n’étions pas si mieux préparés que ça. Peut-être a-t-on péché par excès de confiance. Peut-être n’avions-nous pas les moyens de faire mieux faute de personnel ou d’équipements adéquats. Faute d’une bonne organisation sur le terrain, faute de vigilance ou de bienveillance. Bien des questions demeurent sans réponse claire, nette et précise un an plus tard. Le brouillard persiste.

Je continue donc de croire que la meilleure façon d’honorer la mémoire des victimes serait, une fois la vaccination de masse complétée et la pandémie sous contrôle, d’ordonner la tenue d’une commission d’enquête publique.

Pas tant pour trouver des coupables au sein du gouvernement ou des instances décisionnelles, mais pour avoir l’heure juste. L’esprit et le cœur nets. La conscience un peu plus tranquille. Oui, il y a eu de l’improvisation, de la confusion et des contradictions depuis un an. Dans certains cas, on ne pouvait faire autrement. J’en conviens. Mais il faudra avoir le courage de revisiter cette tragédie et d’en fouiller tous les racoins.

Pour apprendre des erreurs qui ont été commises. Pour mettre en place de meilleurs réflexes, de meilleurs mécanismes de défense et des veilles aux endroits stratégiques. Nous avons chez nous 185 bonnes raisons de le faire.

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