21 janvier 2016 - 00:00
Un cours d’eau pollué, une ville et des débats (5)
Par: Le Courrier
La compagnie Penmans Limitée est pointée du doigt pour sa gestion des eaux usées en 1963. Coll. Centre d’histoire, Studio Lumière, CH116.

La compagnie Penmans Limitée est pointée du doigt pour sa gestion des eaux usées en 1963. Coll. Centre d’histoire, Studio Lumière, CH116.

La compagnie Penmans Limitée est pointée du doigt pour sa gestion des eaux usées en 1963. Coll. Centre d’histoire, Studio Lumière, CH116.

La compagnie Penmans Limitée est pointée du doigt pour sa gestion des eaux usées en 1963. Coll. Centre d’histoire, Studio Lumière, CH116.


Un jeu d’échelle : entre pouvoir local et pouvoir provincial (suite)

À l’aube de la Révolution tranquille, le gouvernement de Jean Lesage y va d’une réforme de l’appareil gouvernemental qui se manifeste notamment par la ­création de nouveaux ministères et ­d’organismes ­gouvernementaux. C’est dans ce contexte qu’est créée la ­Régie d’épuration des eaux en 1961, qui deviendra, en 1964, la Régie des eaux. Cet organisme a pour mandat de réguler les travaux municipaux dans le secteur des aqueducs, des égouts et des usines d’épuration des eaux usées.

L’année qui précède la création de la ­régie, les ingénieurs de la Division du ­Génie Sanitaire remettent à Alphonse Couturier, alors ministre de la Santé du Québec, un rapport préliminaire portant sur les sources de pollution de la ­Yamaska. On y apprend entre autres que la portion de la rivière située immédiatement en aval de Saint-Hyacinthe est polluée au point d’occasionner des nuisances.

Durant les années qui suivent, la Régie d’épuration des eaux fait savoir aux ­autorités maskoutaines qu’elles devront éventuellement faire traiter les eaux usées provenant du réseau d’égout. Les membres du conseil municipal décident alors de retenir les services de la firme ­d’ingénieurs-conseils Alary et Tanguay pour faire une étude préliminaire relative au traitement des eaux usées.

Dans l’un de ses rapports mensuels de 1963, cette firme soutient, entre autres, que certaines industries de Saint-­Hyacinthe devront procéder à un ­traitement partiel de leurs eaux usées avant de les déverser dans le réseau d’égout municipal : « En particulier, l’école de Laiterie, l’école de Médecine ­Vétérinaire, la Compagnie Penmans ­Limitée, la Compagnie Canadian U.S. Knitting et quelques autres teintureries de moindre importance ». Le rapport final est, quant à lui, déposé le 22 juillet 1964.

Toutefois, il faut attendre jusqu’en 1967 pour que cette étude refasse surface dans les affaires municipales. La Régie des eaux explique dans une lettre adressée au conseil municipal que le projet proposé par la firme d’ingénieurs-conseils Alary et Tanguay : « […] ne tenait pas compte de l’aspect régional du problème et était ­restrictif aux besoins seuls du territoire de la cité de Saint-Hyacinthe. À quelques reprises, la Régie des eaux du Québec […] a demandé de bien vouloir entrer en ­communication avec les municipalités avoisinantes telles que Saint-Joseph, La Providence et Douville, afin d’évaluer ensemble les avantages du traitement en commun des eaux usées ». Lesdites ­municipalités sont alors convoquées à une réunion où elles conviennent que le traitement commun des eaux serait une solution avantageuse pour tout un chacun.

C’est ainsi qu’en juillet 1968, la Régie des eaux autorise la firme d’ingénieurs-conseils Lemieux, Royer, Donaldson, Fields & Associés à entreprendre une seconde étude portant sur le traitement commun des eaux usées de la région de Saint-Hyacinthe. En début d’année 1973, ledit rapport est finalement remis par le ministre de la qualité de l’Environnement, le Dr Victor Goldbloom, aux ­différentes municipalités interpelées par l’étude. Ces dernières ont alors trois mois pour étudier le rapport afin d’en tirer des conclusions et commentaires.

Les autorités maskoutaines confient ainsi cette tâche à une firme d’ingénieurs-conseils Bessette, Crevier, Parent, ­Tanguay et Ass. qui conclue qu’il est ­préférable de s’objecter formellement à l’adoption du rapport, notamment parce que le plan directeur propose la création d’un organisme régional responsable de l’environnement, s’il n’y a pas de fusion des municipalités concernées au ­préalable : « Considérant qu’un tel ­organisme, s’il devenait nécessaire, ne pourra être qu’une source de mécontentement, de discussions acerbes, car il ne pourra jamais satisfaire huit municipalités particulièrement au chapitre de la répartition des coûts ».

Le Conseil municipal adopte donc une résolution dans laquelle il s’oppose à l’adoption officielle, dans sa forme ­actuelle, du plan directeur d’assainissement des eaux usées de la région de Saint-Hyacinthe. Les autorités maskoutaines insistent sur le regroupement ­préalable des municipalités visées par ce plan afin de permettre la gestion et la ­réalisation du plan, une fois révisé, et d’orienter le développement du territoire de façon à amoindrir les coûts d’assainissement.

On peut lire dans Le Courrier du 18 avril 1973 que : « […] le regroupement ­imminent des municipalités autour de Saint-Hyacinthe pèse dans la balance des décisions, compte tenu du fait que ce genre de projet, d’incidence régionale, serait d’une planification et d’une ­élaboration singulièrement ­simplifiées à l’intérieur d’une seule ­municipalité ». À cet égard, les autorités maskoutaines et la firme engagée ont ­vu juste, alors que le choix du site de la future usine d’épuration des eaux sèmera la discorde entre les municipalités.

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