Consciente qu’aucun fil électrique ne peut résister à 100 millimètres de glace, la société d’État s’est plutôt appliquée, après les événements de 1998, à faire en sorte d’améliorer son temps de réaction. Exemple concret : les pylônes et les poteaux sont maintenant conçus pour qu’en cas d’importantes accumulations de glace, ce soient les fils qui cèdent en premier, et non le pylône ou le poteau lui-même, a expliqué en entrevue Marie-Ève Gagné, ingénieure responsable du réseau de transport chez Hydro-Québec. On comprend évidemment qu’il est beaucoup plus rapide de refixer les fils que de reconstruire toute l’infrastructure. « La conception anti-chute n’a pas fait le travail [en 1998], alors on a refait l’ingénierie des nouveaux équipements », a indiqué l’ingénieure. On espère ainsi un rétablissement du service plus rapide que durant la crise du verglas, où des semaines avaient été nécessaires pour rebrancher tout le monde, justement parce que les pylônes et les poteaux s’étaient effondrés en série. En fait, 80 % du temps de réparation a été déployé uniquement à cette fin, alors que 10 000 employés étaient sur le terrain au plus fort de la crise, a rappelé Marie-Ève Gagné.
Sur les lignes de transport récentes, environ un pylône sur dix est de conception encore plus robuste, afin de « limiter l’effet domino » en cas de catastrophe, a-t-elle aussi ajouté. Au total, l’ingénieure précise que 900 kilomètres de lignes ont été renforcés en Montérégie.
Boucle montérégienne
Les quantités exceptionnelles de pluie verglaçante qui se sont abattues dans le fameux « triangle noir » formé par les villes de Saint-Jean-sur-Richelieu, Granby et Saint-Hyacinthe ont aussi mis en lumière la vulnérabilité de notre région quant à son approvisionnement en électricité. Sa seule source d’énergie électrique provenait alors du poste de Saint-Césaire, lui-même alimenté uniquement par le poste de Boucherville (voir la carte). Saint-Hyacinthe, avec son positionnement en fin de ligne, était particulièrement vulnérable à toute rupture dans cette partie du réseau, ce qui s’est justement produit en janvier 1998.
Après coup, la société d’État a donc voulu sécuriser la région en mettant de l’avant l’imposant projet de « boucle montérégienne », qui consistait principalement à construire une nouvelle ligne à haute tension (735 kV) entre le poste Hertel et celui des Cantons, avec un nouveau poste entre les deux extrémités à Sainte-Cécile-de-Milton. Avec d’autres raccordements mineurs, la région de Saint-Hyacinthe est maintenant « bouclée » et peut donc être alimentée par une ligne alternative en cas de bris majeur sur une section du réseau, soutient Hydro-Québec.
Ces améliorations ne permettraient pas de se soustraire à un éventuel phénomène météorologique extrême, mais elles devraient au moins faire en sorte que le courant revienne plus rapidement si jamais une situation comme celle de 1998 devait se reproduire.
Un réseau plus robuste, mais pas invincible
Un réseau plus robuste, mais pas invincible
Le long délai avant que les clients d’Hydro-Québec ne soient rebranchés en 1998 s’expliquait par la chute de nombreux pylônes sur le réseau. Photothèque - Patrick Deslandes | Le Courrier ©
Le réseau d’Hydro-Québec avant le verglas de 1998 et celui après la construction de la boucle montérégienne. Photothèque | Le Courrier ©
Le réseau d’Hydro-Québec avant le verglas de 1998 et celui après la construction de la boucle montérégienne. Photothèque | Le Courrier ©
Vingt ans après la catastrophique tempête de verglas qui s’est abattue sur la Montérégie, sommes-nous à l’abri d’une autre crise? Ce n’est pas pour être pessimiste, mais Hydro-Québec nous rappelle malheureusement que « le risque zéro n’existe pas ».