« J’ai toujours eu une bonne mémoire. C’est ce qui m’a permis de devenir avocat parce que je n’étais pas très studieux! » rigole Marcel Nichols.
Ce dernier a vu le jour en 1927 à Saint-Hyacinthe, où il a passé son enfance. « Je suis né sur l’avenue Laroque, entre la rue Nichols et la rue Girouard, dans une petite maison qui est encore là aujourd’hui », raconte celui qui a eu comme frère Léon Nichols, maire de Saint-Hyacinthe de 1968 à 1971.
Tout au long de l’entrevue, le magistrat retraité surprend par son étonnante capacité à se souvenir, dans les moindres détails, des épisodes qui ont marqué sa jeunesse et sa longue carrière.
Avocat pendant 14 ans, Marcel Nichols a été ensuite nommé juge à la Cour supérieure du Québec pour le district de Montréal en 1968, à l’âge de 40 ans. Puis, en 1982, il a fait le saut à la Cour d’appel où il est demeuré jusqu’en 1995, année de sa retraite. C’est en 2004, après avoir arrêté de faire de l’arbitrage, qu’il a eu pour la première fois l’idée de rédiger sa biographie. « À ce moment-là, j’avais beaucoup de temps libres et comme j’avais gagné ma vie à écrire des jugements, je me suis dit que j’allais essayer d’écrire mes mémoires », explique-t-il en précisant qu’il s’est consacré à cette activité pendant huit ans.
Après les diverses corrections et la recherche d’un éditeur, Les empreintes du temps a finalement vu le jour à l’automne 2015. Une peinture de sa femme Louise Carrier décore d’ailleurs la page couverture.
Marcel Nichols confie qu’il n’a pas eu trop de difficulté à se détacher du « style cartésien propre à la rédaction de jugements » pour l’écriture de ses mémoires qui se veulent anecdotiques, rebrassant les hauts et les bas de sa vie, ne voulant pas proposer un ouvrage uniquement à caractère juridique. « La carrière de magistrat aurait pu fournir suffisamment de matière pour alimenter un bouquin respectable, mais je n’étais pas enclin à revivre les débats auxquels avaient donné lieu les nombreux litiges que je fus appelé à trancher », précise-t-il dans la préface de son livre de 564 pages.
Une vie mouvementée
Né dans une famille de six enfants, l’ancien juge a fréquenté l’école Larocque, l’Académie Saint-Dominique, puis le Séminaire de Saint-Hyacinthe pour suivre le cours classique, avant d’être placé au pensionnat de l’Université d’Ottawa en 1942.
Son souvenir le plus marquant de ses années en sol maskoutain demeure la perte de son grand ami Claude Chartier, qui est mort le 18 janvier 1938 lors de l’incendie du Collège du Sacré-Coeur sur la rue Laframboise. « Claude est retourné au Collège le dimanche, une semaine après le début des cours. Le feu du Sacré-Coeur a eu lieu dans la nuit du dimanche au lundi et il est décédé. J’ai perdu mon meilleur ami dans ce temps-là », se remémore Marcel Nichols.
Après avoir terminé ses études en droit à l’Université de Montréal, le père de trois enfants et grand-père de trois petits-enfants a pris la direction de Drummondville où débute alors sa carrière d’avocat. Il a fondé son propre cabinet en 1958, puis est devenu procureur de la Couronne. Élu maire de Drummondville-Ouest en 1961, une de ses grandes fiertés est d’avoir été responsable de la fusion de sa municipalité avec celle de Drummondville en 1966.
Puis, en mars 1968, Marcel Nichols a embrassé la carrière de juge après avoir appris sa nomination de la bouche de Pierre Elliott Trudeau, alors ministre de la Justice du Canada. « J’ai aimé ma carrière de juge parce que j’ai fait de tout. J’ai fait du droit civil, que j’adorais, principalement, mais j’ai aussi fait beaucoup d’assises criminelles et du droit de la faillite », raconte-t-il. Ce dernier a d’ailleurs vécu des débuts plutôt agités, alors qu’il a été entre autres chargé de présider le procès de Charles Gagnon en 1969, pour le meurtre de Thérèse Morin, et celui de Paul Rose en 1971, pour le meurtre du ministre Pierre Laporte, tous deux membres du Front de libération du Québec (FLQ). « On siégeait sur la rue Parthenais, dans l’édifice de la Sûreté du Québec qui venait d’ouvrir, par mesure de sécurité parce que le palais de justice n’était pas assez sécuritaire », se souvient-il à propos du procès de Paul Rose, alors hautement médiatisé.
Un témoin de son époque
Tout au long de sa vie, Marcel Nichols aura aussi été un témoin privilégié du 20e siècle, voyant défiler les décennies au fil des événements historiques et de l’arrivée des nouvelles technologies.
« Mon collègue le juge Jean-Louis Beaudoin, qui a une réputation de juriste exceptionnelle au Québec, a lu mon livre et il m’a dit : « C’est une anthologie de l’époque que tu as vécue ». Un portrait, une photographie de la vie que j’ai vécue à ce moment-là et que tout le monde vivait. J’ai été témoin par exemple des débuts de la radio, de la télévision », observe celui qui adore chasser dans ses temps libres.
Le livre Les empreintes du temps est disponible en librairie.