19 novembre 2020 - 14:34
Requête en inopérabilité
Une décision attendue dans le dossier de Maxime Labrecque
Par: Olivier Dénommée
Maxime Labrecque a été reconnu coupable le 19 octobre 2019 du meurtre au premier degré d’Isabelle Lavoie, mais la saga judiciaire n’est toujours pas terminée puisque le juge Michel Pennou doit encore décider à une date ultérieure s’il accepte que son dossier soit révisé après 15 ans de pénitencier plutôt que les 25 années fermes qu’impose la gravité des actes commis par Labrecque en septembre 2016 sur son ex-conjointe. Photo gracieuseté

Maxime Labrecque a été reconnu coupable le 19 octobre 2019 du meurtre au premier degré d’Isabelle Lavoie, mais la saga judiciaire n’est toujours pas terminée puisque le juge Michel Pennou doit encore décider à une date ultérieure s’il accepte que son dossier soit révisé après 15 ans de pénitencier plutôt que les 25 années fermes qu’impose la gravité des actes commis par Labrecque en septembre 2016 sur son ex-conjointe. Photo gracieuseté

Voilà 13 mois jour pour jour que Maxime Labrecque a été reconnu coupable du meurtre au premier degré de son ex-conjointe Isabelle Lavoie. Si la peine pour un tel acte est automatiquement la prison à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans, on attend toujours une décision du juge Michel Pennou concernant une inhabituelle requête en inopérabilité déposée par la défense, alléguant que le dossier de son client devrait pouvoir être révisé après 15 ans. Les parties ont fait valoir leurs arguments le 12 novembre au palais de justice de Saint-Hyacinthe.

Me Martin Latour, représentant le Maskoutain de 38 ans, a insisté sur le caractère « cruel et inusité » d’imposer une peine de 25 ans de prison à un homme qui, selon lui, a été reconnu coupable devant jury d’un meurtre concomitant à du harcèlement criminel. Selon le Code criminel, « indépendamment de toute préméditation, le meurtre que commet une personne est assimilé à un meurtre au premier degré lorsque celle-ci cause la mort […] alors qu’elle avait l’intention de faire craindre à la personne assassinée pour sa sécurité ou celle d’une de ses connaissances », mais Me Latour met en doute la constitutionnalité de cet article qui met le harcèlement criminel sur le même pied d’égalité en matière de gravité qu’une agression sexuelle ou la séquestration.

La défense soutient également que le fait de pouvoir réviser le dossier du meurtrier après 15 ans au lieu de 25 pourrait servir de « carotte » pour aider à sa réhabilitation dans la société. « Plusieurs pays dans le monde jugent que ça ne sert à rien de garder une personne en prison pendant plus de 15 ans si elle est à 100 % réhabilitée », a plaidé l’avocat de la défense au juge Pennou, déplorant un système qui prône, selon lui, « la punition à tout prix » au détriment des « espoirs du condamné ».

Le ministère public ne partage pas du tout l’interprétation de Me Latour. Me Claudie Gilbert, représentant la Couronne dans cette affaire, a répliqué qu’« il est inexact de dire que le jury a probablement retenu la thèse du harcèlement criminel » pour en venir au verdict de meurtre au premier degré, soulignant que plusieurs éléments de preuve tendaient à montrer que le meurtre sordide commis le 13 septembre 2016 à l’endroit d’Isabelle Lavoie était planifié et de propos délibéré.

De son côté, Me Maxim Larose, représentant le Procureur général du Québec, invite le juge Pennou à la retenue judiciaire dans ce dossier, ne voyant pas la pertinence pour le magistrat de trancher sur la constitutionnalité des articles concernés du Code criminel dans la présente affaire, dont la peine minimale obligatoire est appropriée, selon lui, pour les actes commis par Labrecque. « L’accusé gardera l’espoir de réhabilitation même si c’est après 25 ans. Le requérant n’a pas justifié pourquoi 25 ans serait cruel et inusité. » Me Larose a aussi suggéré que « les Canadiens ne seront pas choqués » si Maxime Labrecque demeure derrière les barreaux 25 ans et que la peine automatique est loin de « miner la dignité humaine » malgré les contestations de la défense.

Affaire Bissonnette

Après avoir écouté les arguments des deux parties, le juge Michel Pennou s’est demandé s’il ne valait pas mieux attendre un jugement de la cour d’appel dans l’affaire Alexandre Bissonnette, l’auteur de la tuerie de la grande mosquée de Québec en janvier 2017, avant de rendre le sien. Rappelons qu’en première instance, le juge François Huot avait décidé de réécrire une disposition législative sur les peines consécutives pour ordonner 40 ans de prison ferme au meurtrier. On ne sait pas exactement quand la cour d’appel doit rendre son verdict dans cette affaire, mais les parties ont défendu leur position en janvier dernier. Pour le moment, aucune date n’a été fixée non plus dans le dossier de Maxime Labrecque.

Si les avocats de Maxime Labrecque parviennent à convaincre le juge de permettre la révision de son dossier après 15 ans de prison, cela voudrait dire que le meurtrier pourrait théoriquement sortir à compter de 2031, à l’âge de 49 ans, s’il est considéré comme « complètement réhabilité » d’ici là, un scénario qui est loin de plaire aux proches d’Isabelle Lavoie. « Ça me stresse de penser qu’il pourrait n’avoir que 15 ans de pénitencier avant de sortir. Tant que ça ne sera pas complètement clos, faire notre deuil sera difficile », avait confié Lise Castonguay, mère de la victime, quelques jours après le verdict et le dépôt de la requête en inopérabilité.

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