Cet avis est d’ailleurs contesté par l’organisme et fait actuellement l’objet d’échanges soutenus entre la direction de la Chambre de commerce et les fiscalistes de Revenu Québec. Ces deux parties divergent d’opinion sur la façon de considérer les sommes d’argent qui servent à financer l’opération charme de la grande région.
Aux yeux de la Chambre, l’argent injecté par la Ville de Saint-Hyacinthe, la MRC et les partenaires privés doit être vu comme étant de simples contributions, alors que Revenu Québec y voit plutôt des subventions. La nuance est importante puisque la Chambre ne pourrait réclamer le remboursement des taxes applicables à des dépenses faites à partir de subventions. « Revenu Québec prétend que nous n’avions pas le droit de les réclamer parce que les contributions reçues à titre de subventions ne sont pas assujetties aux taxes. Nous, on considère ça comme une donation. Le problème est là », explique Pierre Rhéaume, directeur général de la Chambre de commerce.
Le problème serait toutefois encore plus complexe dans la mesure où le débat concerne aussi la nature des dépenses engagées par la Chambre.
Revenu Québec soutient que la Chambre ne peut réclamer de remboursement de taxes pour des dépenses qui ont procuré un bénéfice direct à ses membres. Or, la Chambre soutient que la campagne a plutôt profité à toute la région, ce qui lui permettrait alors de réclamer des taxes sur les dépenses qui y sont associées.
« Comme c’est souvent le cas en matière fiscale, tout est une question d’interprétation, renchérit Louis Bilodeau, directeur général de la Ville de Saint-Hyacinthe, à titre de partenaire de la Chambre. Tout le monde est de bonne foi dans ce dossier. »
Dans le cas présent, la réclamation de 155 038 $ couvre la période d’avril 2014 à septembre 2015 et vise la TPS et la TVQ qui ont déjà été remboursées à la Chambre par Revenu Québec ainsi qu’un montant de taxes qu’elle aurait dû déclarer dès la réception des fonds, en provenance de la Ville. « Selon ma compréhension, c’est la Chambre et non la Ville qui aurait dû percevoir ces taxes, même si l’argent des donateurs a d’abord été reçu par la Ville avant d’être retourné à la Chambre. C’est elle seule qui fait l’objet de l’avis de cotisation », précise M. Bilodeau.
Même si la Chambre croit en ses chances de succès dans cette chicane fiscale à l’issue incertaine – elle est appuyée dans ses démarches par un expert de la firme Deloitte -, elle a quand même pris soin de se préparer à toute éventualité dans la mesure où Revenu Québec persisterait dans sa logique. La campagne de visibilité se poursuivra donc comme prévu au cours des prochaines semaines, mais on prendra grand soin de ne pas tout dépenser. « Il n’est pas question de mettre la campagne sur la glace, mais la prudence est de mise tant que ce dossier ne sera pas éclairci et que nous n’aurons pas l’assurance que tout est en règle. Si jamais un remboursement s’imposait, on prendra l’argent que nous avons déjà et qui devait servir à la campagne. La Chambre de commerce n’aura pas à payer pour cela », assure M. Bilodeau.
Une campagne de 1 M$
Orchestrée par la Ville de Saint-Hyacinthe, la MRC des Maskoutains et laChambre de commerce locale, la campagne publicitaire lancée en 2014 et planifiée sur trois ans s’inscrit dans les Orientations et priorités de la Ville qui souhaite accroître sa population pour atteindre 60 000 citoyens en 2020.
Les coûts estimés de la campagne étaient de 1,2 M$. Pour atteindre ce montant, une campagne de financement fut mise sur pied. Outre la Ville et la MRC, une trentaine de donateurs privés y ont contribué. À ce jour, la Chambre a reçu des contributions de 986 163 $, dont 277 554 $ en 2016.
Selon la mécanique en place, c’est la Ville de Saint-Hyacinthe qui percevait les dons et transférait ensuite les sommes à la Chambre de commerce, question de pouvoir émettre des reçus fiscaux aux donateurs. Les montants récoltés ont servi entre autres à réserver des espaces publicitaires dans les médias ou les endroits publics, à acquérir du matériel publicitaire et à défrayer les services d’agences de communications.