Candice Cornet est anthropologue et cela fait plusieurs années qu’elle canalise ses recherches sur le Maroc. Elle s’intéresse aux régions amazighes, au patrimoine et au développement touristique. De façon progressive, l’enseignante a réussi à développer un partenariat en 2016 entre l’université marocaine et le cégep maskoutain. Une réception officielle a été organisée en présence notamment du gouverneur de la province, du président de l’université, de dignitaires de haut niveau et de chefs religieux et politiques.
Ce séjour à la fois académique et interculturel s’inscrit dans le cadre du cours dispensé au cégep intitulé Démarche d’intégration des acquis en sciences humaines (DIASH). La classe est divisée en quatre équipes étudiantes et chacune a un travail de recherche à effectuer sur un enjeu particulier qui touche le Maroc. Cette rencontre avec les différents intervenants a permis aux étudiants de faire de l’observation participante, de la collecte de données ainsi que des entrevues pour leurs projets de recherche de fin d’études.
Parmi les visites planifiées lors de ce séjour, les 16 étudiants et les deux enseignantes ont eu l’opportunité de visiter le site archéologique de Volubilis, inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO (photo). Une visite qui les a enchantés et qu’ils ne sont pas près d’oublier, surtout qu’ils ont eu la chance d’être accompagnés d’un archéologue réputé, Lahcen Boudarka, qui a fouillé le site. « Je n’ai jamais exploré Volubilis comme ça. C’est un parcours riche pour les étudiants. On a aussi eu l’occasion de voir Fès, Moulay Idriss Zerhoun, les montagnes de l’Atlas… On leur a montré les différents visages du Maroc », a attesté Mme Cornet, encore émerveillée par ce voyage.
Elle explique que son objectif premier était de démystifier les perceptions que l’Occident a vis-à-vis de l’islam et qu’elle sent aussi chez les Marocains le désir d’arrêter d’être jugés par la religion. « De tous les peuples que j’ai rencontrés dans ma vie, les Marocains sont les plus tolérants. C’est enrichissant pour les étudiants parce qu’ils deviennent par la suite des porte-paroles pour un peu démystifier cette association très facile que l’islam égale violence et extrémisme, tout ce que les médias semblent mettre de l’avant. Je voulais qu’ils découvrent un islam complexe, un exemple de tolérance pour cette religion. Une bonne influence sur le monde musulman en général. »
Son deuxième objectif était que les étudiants remplissent les compétences de ce cours et qu’une recherche de qualité soit faite à travers la collecte et l’analyse.
Éloïc Potel, finissant en sciences humaines, a adoré ce voyage et en particulier la chaleur des Marocains, qui étaient aux petits soins avec le groupe. « C’est l’expérience d’une vie. C’est tellement enrichissant comme périple, cela m’a ouvert les yeux sur beaucoup de choses. Cette expérience a suscité en moi une certaine réflexion. J’ai pu échanger avec les étudiants là-bas, qui parlaient anglais ou français. Un autre point, c’est l’hospitalité qui est légendaire, ce n’est pas un cliché, c’est bien réel. »
Il ajoute également que, grâce aux discussions avec des personnes haut placées dans le milieu religieux marocain, il a pu déconstruire certaines idées préconçues, surtout en ce qui concerne la religion.
Sa condisciple Juliette Bisaillon a apprécié le voyage et le partage de connaissances avec les étudiants là-bas. « L’accueil était incroyable partout où on allait. Les paysages étaient magnifiques. Selon moi, la meilleure partie, ce sont les échanges avec les étudiants marocains qui nous ont permis de répondre à nos questions de recherche. Malgré la différence entre les deux pays, la communication était fluide. »
Marijo Demers, enseignante en sciences politiques, qualifie ce séjour de « jamais vu » et trouve cette expérience « d’une richesse incroyable et inouïe ». « Candice et moi, on connaît et on apprécie l’accueil et l’hospitalité au Maroc. On avait d’ailleurs averti les étudiants. C’est d’une chaleur et d’une générosité sans pareil autant au niveau urbain qu’au niveau rural. Cette richesse s’est manifestée du côté des échanges de nos étudiants avec des doctorants universitaires marocains et avec toutes sortes de personnes issues du milieu rural ou académique. »
L’accueil chaleureux des Marocains semblait coutumier pour Candice Cornet, qui se rendait au Maroc pour la 10e fois cette année. Ce qui a marqué aussi les deux enseignantes, c’est l’intérêt des médias nationaux à l’égard de leur visite. Une couverture médiatique nationale, tous supports confondus, a eu lieu également. « On a été très bien accueillis. Les Marocains sont les meilleurs hôtes au monde. On a rencontré le gouverneur de la province. On a reçu un accueil très protocolaire, comme une délégation canadienne et non provinciale. »
Mme Demers confirme sa volonté de faire rayonner le Cégep de Saint- Hyacinthe à l’étranger, de développer des partenariats et de les instituer de manière durable. L’enseignante en sciences politiques estime que ce séjour spécial constitue une découverte sur les plans traditionnel, spirituel et culinaire. « Les étudiants avaient une grande soif de connaître, d’apprendre et de découvrir l’autre. Pour la plupart d’entre eux, âgés entre 18 et 20 ans, ce voyage est une première incursion dans un pays dont les traditions sont loin des repères occidentaux. Tout était à la hauteur : la nourriture, l’accueil, les chansons, les danses. Candice et moi, on s’y attendait, mais cette année, le degré était encore plus haut. C’est une couverture qu’on n’a jamais vue. Je dirais que ce cours constitue quatre séjours en un. On a rencontré beaucoup d’interlocuteurs, d’acteurs qui ont fait la richesse de ce cours terrain », a-t-elle mentionné.
Mme Demers juge que le bilan de ce voyage s’avère positif. Conjointement avec sa collègue Candice, elle s’efforce depuis 2016 de démystifier le monde arabo-musulman. Elle se désole que l’islam soit souvent considéré avec beaucoup de suspicion. « Malheureusement, depuis septembre 2001, le monde arabo-musulman a souvent mauvaise presse. Il existe une incompréhension de ces sociétés arabo-musulmanes. On a trouvé que le Maroc offrait une grande histoire du royaume chérifien, des villes pluriséculaires et une richesse patrimoniale. Les étudiants ont pu constater comment ce royaume était une terre de protection pour les juifs. Comment les minorités étaient protégées et comment la culture juive a imprégné la culture marocaine. L’identité marocaine, ce n’est pas uniquement des Marocains musulmans. C’est bien plus que ça. »
Elle souligne que le grand message véhiculé dans les milieux religieux visités et à travers les prises de paroles des universitaires, c’est un message de coexistence pacifique, de tolérance. « Ce voyage a suscité une plus grande compréhension de l’autre, une plus grande ouverture, une plus grande tolérance. À mon humble avis, on a quand même accompli notre mission », a-t-elle conclu.